1.2.07

PELLIGRINI IRA A LA PECHE


L’armée, que l’on surnomme la grande muette, perd, avec Pellegrini, un général bavard et aux propos fort décousus.

Le 17 février, il quittera et l'ONU et l'armée française. Le 18, il déclare son intention d’aller "pêcher à la ligne"...

Faut-il l’informer que la saison du brochet vient juste de se terminer. Le général va devoir patienter pour affronter d’autres carnassiers, certainement plus arrangeants et moins dangereux que le Hezbollah.

Mais enfin, Pellegrini partira à la retraite avec le sentiment du devoir accompli. C'est beau, émouvant !

Le devoir accompli...C’était également le sentiment d’un autre général français, devant la ligne Maginot enfin achevée, en 1936. On connaît la suite.

Se contenter de peu est un gage de pleine réussite

Pellegrini énumère quelques "résultats positifs" : "La zone a été stabilisée et sécurisée, et il n'y a plus d'armes illégales dans le sud du Liban ».

La précision est importante et elle ne gruge que les imbéciles.

Premièrement, parce qu’avec plusieurs milliers de soldats à pied d’œuvre, il serait vraiment dommage que le Liban sud, qui est grand comme un canton rural français, contiennent encore des armes « illégales ». Si la preuve venait à être faite que cette région en contient encore, on pourra toujours se rappeler au bon souvenir de ce général.

Ensuite, parce que Pellegrini ne parvient pas à donner au public la définition exacte de l’arme « illégale ».

Dans un pays en pleine décomposition, avec une assemblée nationale qui ne parvient plus à se réunir depuis plusieurs mois, où trouver la définition de "l’arme légale" ?

Enfin, et Pellegrini le sait, le problème du maintien de la paix ne vient pas des quelques armes qui se trouvent encore au Liban Sud - malgré ses dénégations - mais bien de celles qui transitent jour après jour par la plaine de la Beeka.

Mais le général français ne s’est jamais senti concerné par ce trafic là. C’était hors de sa juridiction. Il ne se sent pas concerné non plus par la question du réarmement du Hezbollah : "Je me situe totalement en dehors de cette question, parce que cela se passe au nord du Litani, et que ce n'est pas ma zone. Je n'ai pas connaissance d'armes entrant dans ma zone".

On a connu des arguments moins pathétiques. Mais peut-être Pellegrini avait-il reçu des ordres stricts qu'il faudra bien un jour juger au regard de l'Histoire.

Général gaffeur

A force de bavarder devant les journalistes, le général Pellegrini commet tout de même quelques bourdes qui n’ont rien à envier à certaine candidate à la Présidentielle.

C’est ainsi que l’on apprend que 6 drones d’observation hyper perfectionnés sont stationnés devant les casemates de la Finul. Malheureusement, ils n’ont pas encore reçu l’autorisation de décoller. L’ONU ne veut donc rien savoir des trafics d’armes qui ont lieu à quelques kilomètres de ces cantonnements.

De toute façon, Pellegrini est clair : en cas de décollage de ces appareils hors de prix, "les informations amassées par les drones ne seraient pas transmises aux Israéliens, même s'ils cessaient leurs survols du Liban".

Après un tel aveu, Pellegrini et les diplomates de l'ONU voudraient qu’Israël leur fasse confiance.

Il faut donc résoudre une équation impossible. Les drones de la FINUL sont là pour surveiller les frontières du Liban mais ils ne peuvent pas décoller. Dans le même temps, on condamne les survols quotidiens par l’armée de l’air israélienne qui fait le travail des drones onusiens. Quelle belle chose que la diplomatie ! (lire sur Primo Pellegrini, l'homme qui voit passer les avions)

A Tel-Aviv, les militaires sont dubitatifs : "Si la Finul use de drones pour mieux connaître les activités du Hezbollah et le désarmer, très bien. Sinon, quel intérêt ?", demande un officier supérieur. C'est la bonne question.

Autre bourde

Comme beaucoup d'officiers français, le général Pellegrini est plutôt admiratif du travail de l'armée libanaise. "C'est une armée très légaliste, note-t-il. Du moment qu'elle n'a pas reçu l'ordre de désarmer le Hezbollah, elle n'a aucune raison de le faire."

Et le public qui pensait naïvement que la FINUL était là pour procéder au désarmement des groupes armés au Liban afin de rétablir la pleine souveraineté de ce pays sur son territoire, ainsi que l'a toujours clamé Chirac. "J'ajoute que toutes les résolutions du Conseil de sécurité concernant le Liban, toutes sans aucune exception, ont pour but d'aider ce pays à recouvrer sa pleine et entière souveraineté. Elles doivent être appliquées" (Jacques Chirac, le 25 janvier 2007, devant les délégations de Paris III).

Les fins de règne ne sont pas toujours faciles à gérer.

Je n'ai pas connaissance de mouvements d'armes dans ma zone, dit le général au sortir de sa mission diplomatico-militaire.

Pas grave, mon Général !

Concentrez vous sur votre prochaine partie de pêche. Cette activité présentera l’immense avantage de vous obliger à vous taire. Le brochet a un caractère ombrageux.

Pierre Lefebvre © Primo, 31/01/2007

Crédit photo : site de l'ONU

Auteur : Pierre Lefebvre
Date d'enregistrement : 01-02-2007