29.5.09
Boycottons, coton !
Depuis quelques mois, les appels au boycott d’Israël se multiplient. Ils ne sont que la résurgence en France d’actions plus profondes depuis 40 ans environ.
A peu près à la même époque de l’embargo de la France sur les armes destinées à Israël décidé par De Gaulle. L'embargo d'un jour contribue, des années plus tard, à légitimer un boycott.
Le refus de la France d’aider en 1969 cette jeune démocratie à se défendre était motivé par la recherche de débouchés dans les pays arabes.
On se rappelle l’affaire des vedettes de Cherbourg qu’Israël avait acheté et que la France conservait dans le port normand.
On se souvient surtout de l’immense éclat de rire dans le monde entier. C’est un souvenir douloureux pour notre Marine et notre fierté "nationales".
Une équipe israélienne, profitant du relâchement éthylique consécutif aux libations du Réveillon de Noël, avait barboté purement et simplement les 5 vedettes restantes sur les 12 que l’Etat français s’était engagé à livrer, par contrat.
Elles ont quitté Cherbourg dans la nuit du 24 au 25 décembre 1969 et sont arrivées dans le port d’Haïfa juste à temps pour le réveillon du Nouvel an. De la bel ouvrage ! Timing parfait ! Tout cela au nez et à la barbe de la Marine qui n’y avait vu que du feu.
Fureur de Michel Debré, alors Premier ministre et grosse colère de Pompidou. L’amiral Israélien Moka Limon, responsable de cette opération, a déclaré quelques années plus tard : « Michel Debré avait demandé à la marine de stopper ou même de couler les vedettes. Mais on m’a dit aussi que le chef d’état-major français avait refusé et menacé de démissionner ».
Boycott et embargo
Ce sont bien entendu des notions qui recouvrent des réalités différentes, tant sur le plan commercial que juridique.
Mais les idéologues à la petite semaine qui hantent les associations de défense des Palestiniens depuis 40 ans et qui n’ont trouvé que ce combat pour justifier leur antisémitisme latent, ne l’entendent pas de cette oreille.
Depuis, accompagnés de sénatrices et soutenus par d’anciens comiques, ils se sont reconvertis dans un sport qui leur donne enfin l’impression d’exister, le boycott des produits israéliens, et ce, sous couvert de défense des Droits de l’Homme.
Battre le carrelage des grandes surfaces et brandir devant la caméra des serviettes hygiéniques en provenance de Tel Aviv est certes un peu moins glorieux que la lutte armée.
Mais il parait que l’amour-propre est inversement proportionnel à l’intelligence et la culture générale.
Certains antisionistes jurent leurs grands dieux qu’ils ne sont pas antisémites. Cette fixation continuelle, permanente, ces attaques incessantes à l’encontre de la légitimité de l’Etat d’Israël n’ont pourtant aucune autre explication.
Dans les comités régionaux de France Palestine, on retrouve des anciens de la gauche dure désormais embourgeoisés, des catholiques de gauche, d'anciens de l'UDF baptisé MODEM, des militants syndicaux et quelques rares personnes simplement mal informées qui s’apitoient sur le sort des Palestiniens sans vouloir en connaître les causes réelles.
Pour ces derniers, Primo a inventé un néologisme : les BIMI'S (Bien Intentionnés, Mal Informés).
Tous ceux là, à quelques rares exceptions près, ont une méconnaissance crasse de l’histoire du Moyen Orient. Ils sont également, qu’ils le veuillent ou non, influencés par un terreau fertile d’antisémitisme de plus en plus prégnant dans la société française.
Comment en effet, expliquer autrement cet ancrage monomaniaque à lutter contre la seule démocratie du Moyen-Orient ?
« Israël se comporte de manière cruelle avec les Palestiniens ». Cet axiome de base dans leurs petites pensées rabougries ne tient pas au regard de la réalité proche-orientale ainsi que de l’actualité sombre de notre planète.
Car, même si cela était vrai, il faudrait alors attendre de ces « militants » associatifs la même indignation à l’encontre des pays violant sans cesse les Droits de l’homme qu’ils sont censés respecter.
Vous voulez du boycott ? Allons-y derechef !
Partons en guerre économique, frères et sœurs, contre l’Empire de Chine.
1000 exécutions capitales par an, des dizaines de milliers de morts chaque année du simple fait de l’incurie administrative, de son incapacité à lutter contre des fléaux aussi destructeurs que le HIV. Sans parler du sort réservé au Tibet.
N’achetons plus chinois ! On se remettra au moulin à légumes en lieu et place de nos robots de cuisine. Plus d’aspirateurs, de petites culottes, d’ordinateurs, de téléviseurs, de calculettes, de petits polos d’été et de chaussettes !
Jouons au tennis chaussés de sabots. Le spectacle gagnera en comique ce qu’il perdra en vélocité.
107 condamnés à mort attendaient dans les prisons japonaises en 2008. Halte à l’importation de leurs instruments de musique, de leurs voitures, de leurs appareils électroniques !
Des dizaines de milliers d’enfants, esclaves, enchaînés à leurs métiers à tisser, travaillent pour de riches familles indiennes et les multinationales complices.
Travailleuuuuurs, halte aux textiles en provenance d’Inde !
Ils sont fabriqués par des armées d’enfants de moins de 12 ans pour 8 euros de salaire mensuel versés aux familles.
Ré-ouvrons d'urgence nos filatures afin de combler la légitime attente des ménagères et des stylistes !
Les morts se comptent par milliers également dans les Etats arabes, Emirats et autres royaumes. Attentats, décapitations, lapidations, meurtres de masse, crimes d'honneur...
Refusons d’assister aux matches de football. Luttons même contre leurs diffusions à la télévision ! Car les plus grands clubs européens sont désormais leurs propriétés exclusives, pétrodollar aidant.
En Egypte, plus de 250 femmes ont été tués par leur mari ou par un membre de la famille en 2008. Plus de 70 % des femmes sont analphabètes ou excisées. La minorité copte se fait massacrer.
Nous n’irons plus au bas des Pyramides, ni sur le Nil, dans ces bateaux surchargés qui charrient le touriste gluant de transpiration, suffocant sous les effets conjugués de la chaleur, du tabac et des effluves des moteurs diesel.
Et l'Afrique, et l'Afrique... Alouette...
Refusons tout lien économique, toute entraide, toute solidarité avec les dictatures africaines qui massacrent, exploitent leurs populations à seule fin d’acheter quelques immeubles de rapport dans les quartiers huppés de Paris.
Sus, mes Preux, sus aux meubles en bois africain dont la fabrication éventre et appauvrit la terre africaine, contribuant ainsi à sa désertification.
Pour déguster nos merguez et nos chipolatas au fond du jardin les soirs d'été, préférons une simple cagette récupérée au supermarché du coin. Nos « barbecuteries » familiales ne s’en porteront pas plus mal.
Cessons d'acheter le cacao, le pétrole, le gaz et l'uranium de ces pays rongés par la corruption.
Camarades enseignants-chercheurs, boutons hors de nos universités tout accord de collaboration avec les pays africains qui peinent tant à stopper le génocide du Darfour !
Honnissons l'existence de ces cuistres habitant les Iles Féroé !
En guise d’initiation et de célébration du passage à l’âge adulte, ils perpétuent ces ignobles traditions de massacre des dauphins. (Voir ici Attention photos horribles, âmes sensibles s’abstenir). Comment une société civilisée peut-elle admettre, en son sein et au nom de la tradition, des comportements aussi barbares ?
Boycottons donc le poisson danois. La sardine française, accompagnée d’un petit Muscadet, remplacera avantageusement le merlu, le saumon d’élevage en provenance de ce pays nordique.
En Russie, la liberté d'opinion n'est qu'un simple voeu pieux. Les journalistes sont assassinés, les opposants emprisonnés, les Tchétchènes massacrés, les Georgiens envahis. Refusons tout commerce avec la Russie. Tant pis pour son gaz ! Nous avons celui qui nous vient d'Algérie... Finalement, non : plus de 100.000 morts en 10 ans de guerre civile, cela n'est pas correct.
Hé bien tant pis, faisons mijoter nos cassoulets du dimanche sur nos poêles à bois ressortis de la cave. Le tout à la lueur de la chandelle ! La sylviculture landaise écoulera ainsi ses stocks de bois descendus par les tempêtes.
Rappelons pour finir que 78 % des exécutions capitales ont lieu dans les pays du G20. Isolons-nous, vite ! Le temps presse.
Cesser de rire
Laissons aux boycotteurs cette douce certitude d'être dans le vrai. Cela leur est certainement très agréable.
A leurs yeux, seules comptent, à l’échelle de la dignité humaine, les réactions parfois rudes d’une petite démocratie entourée d’ennemis qui ont juré sa perte dès sa création.
La logique qui affleure sous ces démarches de boycott n'engendre finalement que le racisme, le repli sur soi et le rejet de l'autre.
Les Israéliens se sont, depuis longtemps, habitués à ne pas être aimés. Mais, même s’il est de plus en plus restreint, il y aura toujours en France, un petit Reste*, des petites gens qui considèreront que Jérusalem est à jamais la capitale d’Israël et que ce pays a l'impérieux droit à l'existence.
Certainement au grand dam du quai d’Orsay ! Mais bon, que voulez-vous, les français sont comme ça. Il y en a encore qui résistent à la « bien pensance ».
Cambronne a su répondre aux injonctions de la perfide Albion en un terme qui résume globalement la façon de penser de Primo : MERDE !
Et vive les pamplemousses de Jaffa, les poivrons de Neot Akikar !
Pierre Lefebvre © Primo, 28 mai 2009
* attention, notion théologique imperméable aux petits esprits
http://www.primo-europe.org/