Union européenne
Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne: élections israéliennes et caricatures
Quiconque suit de près l’audience, qui s’accroît d’année en année, de cet organisme à vocation arabo-européenne ne peut que s’inquiéter de l’alignement systématique de ses positions politiques (et idéologiques !) sur celles des ennemis d'Israël, même si ce pays fait partie de cette organisation. (Menahem Macina).
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29/03/06
Texte repris du site de TV5.
Organisme : Parlement Européen
L'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne (APEM) [1] a clôturé sa deuxième session annuelle par un appel aux futurs gouvernements palestinien et israélien à respecter les engagements pris par le passé dans le cadre du processus de paix. Dans une déclaration finale, l'APEM condamne également l'offense faite par les caricatures danoises du prophète Mahomet, ainsi que "les violences déclenchées par leur publication".
La déclaration finale, approuvée par acclamation, exhorte également le futur gouvernement palestinien à respecter la déclaration adoptée à Beyrouth en 2002 par la Ligue arabe qui appelait à la paix avec Israël. L'APEM exprime sa volonté de "poursuivre et renforcer le dialogue israélo-palestinien" en son sein. Elle appelle par conséquent tous les pays membres de l'Assemblée euro-méditerranéenne à ne pas interrompre ou saboter le processus de dialogue.
Mais il est peu probable que les problèmes de visas rencontrés par les délégués palestiniens se reproduisent l'an prochain, a expliqué le président du parlement tunisien, M. Fouad Mebazaa, lors d'une conférence de presse tenue à l'issue de la session. En effet, le Parlement tunisien prend le relais du Parlement européen à la présidence de l'APEM et la prochaine réunion aura, dès lors, lieu à Tunis.
Avant l'adoption de la déclaration finale, l'APEM avait adopté trois résolutions, votées par acclamations et produites par ses commissions politique, économique et culturelle. Le Président du Parlement européen, M. Josep Borrell, qui présidait l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne depuis le mois de mars de l'an dernier, a passé le relais à M. Mebazaa.
Il a déclaré qu'il n'avait "pas encore pris pleinement la mesure de toutes les complexités des pays méditerranéens, qui constituent un concentré de tous les problèmes auxquels est confrontée l'humanité". Il s'est dit fier d'avoir pu rencontrer pour travailler avec eux ses collègues du Sud du bassin méditerranéen, ajoutant: "Nous sommes condamnés à vivre ensemble, bien plus proches que nous ne le sommes aujourd'hui".
Les résolutions adoptées
La résolution politique adoptée par la plénière de l'Assemblée exprime ses inquiétudes face aux "initiatives unilatérales" émaillant le conflit israélo-palestinien et condamne "les récents événements survenus à Jéricho" lorsque les forces armées israéliennes ont donné l'assaut à une prison palestinienne. Au sujet des caricatures danoises, les députés européens et les parlementaires venant des 25 Etats membres de l'UE associés à ceux des dix pays partenaires (Algérie, Egypte, Israël, Liban, Jordanie, Maroc, Autorité palestinienne, Syrie, Tunisie et Turquie) ont condamné sans appel "toute offense aux valeurs religieuses" et ont appelé les gouvernements "à assurer le respect des convictions religieuses (...) et à promouvoir les valeurs de tolérance, de liberté et de multiculturalisme".
La résolution défend également la liberté d'expression en tant que valeur fondamentale, tout en soulignant qu'elle doit s'assortir du respect des droits et des valeurs des autres. Les parlementaires de l'APEM ont invité les gouvernements et les leaders politiques "à s'abstenir de toute déclaration ou intervention de nature à faire penser à l'expression 'choc de civilisations'".
La résolution portant sur les affaires économiques et sociales déclare que l'analphabétisme est l'un des obstacles rencontrés par le développement du Sud et plaide pour que l'éducation soit améliorée. Elle insiste sur la nécessité de revoir le contenu des programmes d'enseignement en usage dans les pays membres de l'APEM comportant "des présentations caricaturales et des demi-vérités au sujet de certains pays partenaires" et renforçant par là l'hostilité et la haine.
Au sud du bassin méditerranéen, il conviendrait d'accorder plus d'attention aux réformes et mesures nécessaires pour attirer l'investissement européen. Les membres de l'APEM préconisent la coopération en matière d'approvisionnement énergétique et, notamment, un financement plus souple des infrastructures reliant le Nord et le Sud, mais aussi le Sud et le Sud. La résolution portant sur le volet culturel demande d'intensifier les efforts pour combattre la pauvreté, une stratégie intégrée pour stopper l'immigration clandestine et l'intégration civique des immigrants dans le respect de leur traditions culturelles. Elle se félicite de l'adoption d'une législation européenne instaurant une procédure commune d'examen des demandes d'asile.
Les débats
Dans la matinée, les parlementaires de l'APEM ont eu un débat touchant de multiples questions. Sur le chapitre des caricatures danoises, le président du parlement égyptien, M. Ahmed Sorour, a expliqué que les caricatures ainsi que d'autres épisodes récents ont révélé l'existence d'un déficit culturel, soulignant par ailleurs que la liberté d'expression ne peut être sans limites. M. Hashem Al-Qaisi, parlementaire jordanien, a estimé qu'il ne suffisait pas de déplorer les caricatures, parce que la situation pourrait alors se reproduire dans un autre pays.
Troels Poulsen, parlementaire danois, a souligné que la société danoise était fondée à la fois sur la liberté d'expression et sur la tolérance religieuse, et que le gouvernement, dans son pays, n'est pas en mesure d'exercer une influence sur les médias. Selon lui, la violence de la réaction à la publication des caricatures est hors de proportion.
Parlementaire turque, Mme Zeynep Uslu a déclaré que la liberté d'expression était une valeur essentielle, mais qu'elle comportait des limites, ce qu'a déjà établi la Cour européenne des Droits de l'homme: la liberté d'expression doit s'exercer dans le respect des religions. Elle a souligné que le but était d'initier une alliance des civilisations et non pas une confrontation entre elles.
Mme Pasqualina Napoletano (PSE, IT) a déclaré que la crise des caricatures posait un réel problème, mais que l'APEM était une assemblée laïque : "Nous devons séparer les activités politiques des activités religieuses. Nous ne pouvons permettre à certains de nous diviser en se servant de la religion".
Suivi des élections palestiniennes
Evoquant l'absence d'un délégué palestinien, M. Borrell a expliqué que les autorités belges avaient refusé un visa conformément aux règles adoptées par le Conseil européen avant la tenue des élections palestiniennes. Ceci, a-t-il précisé, ne signifie nullement que le Parlement européen ou l'APEM ne reconnaissent pas les résultats des élections. Cette question devra, a-t-il ajouté, être résolue afin que les membres des parlements palestinien et israélien soient en mesure de poursuivre leur activité au sein de l'APEM.
M. Hasan Khreishi, vice-président du Conseil législatif palestinien, a demandé que le Hamas soit rayé de la liste européenne des organisations terroristes et que l'UE poursuive son aide à l'Autorité palestinienne, faisant valoir que "si elle se tarissait, cela pousserait le peuple palestinien à des alliances que nous n'appelons pas de nos voeux. Un homme affamé est un homme en colère". Il a, par ailleurs, demandé pourquoi l'exigence de reconnaissance de l'Etat d'Israël avait été reposée, étant donné que l'OLP, à l'époque représentant légitime du peuple palestinien, avait déjà signé les Accords d'Oslo. Il a condamné les "meurtres et enlèvements" commis par Israël aux points de contrôle.
Il a plaidé pour la publication d'un rapport de l'UE sur les discriminations visant les Palestiniens à Jérusalem, mais aussi pour que les sociétés européennes boycottent des projets tels que la liaison par tramway entre les colonies israéliennes et Jérusalem. Le président du Parlement marocain, M. Abdelwahad Radi, a expliqué que le conflit israélo-palestinien restait l'un des principaux obstacles à l'amélioration des relations entre le monde occidental et le monde musulman : "Nous devrons en parler si nous voulons entretenir des relations de bon voisinage. Ce conflit ne tient pas seulement notre région en otage, mais le monde entier".
(Aucun parlementaire israélien n'assistait à la session, en raison des élections législatives imminentes en Israël.)
L'activité de l'APEM
M. Antonios Trakatellis (PPE-DE, EL) a évoqué la nécessité de prendre des initiatives plus vigoureuses en matière de développement économique. Pour lui, la protection civile et la prévention des catastrophes naturelles et écologiques sont un important terrain de coopération; et d'appeler à l'installation sans délai d'un système de détection précoce des tsunamis.
M. Edward McMillan-Scott (PPE-DE, UK) a préconisé "de donner une dimension politique à l'Assemblée en y regroupant les parlementaires selon leur appartenance politique, à l'instar de ce qu'a fait le Parlement européen ces soixante dernières années. Nous devons dépasser les frontières géographiques". M. Carlos Carnero Gonzales (PSE, ES) a abondé dans son sens, constatant que "les socialistes de l'UE et des pays méditerranéens, soit 40 parlementaires au total, étaient réunis hier soir".
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Note de la Rédaction d’upjf.org
[1] L’APEM, également appelée EuroMed (contraction de Euro-Mediterranean Parliamentary Assembly), est issue du Processus de Barcelone, initié les 27 et 28 novembre 1995, à Barcelone, au cours duquel les gouvernements de 27 pays, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne (le Partenariat) ont créé le Partenariat euro-méditerranéen (PEM), avec pour objectif principal de faire du bassin euro-méditerranéen une zone de dialogue, d’échanges et de coopération en vue de garantir la paix, la stabilité et la prospérité. Les signataires sont les gouvernements de l'Algérie, l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, Chypre, le Danemark, l'Egypte, l'Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l'Irlande, Israël, l'Italie, le Luxembourg, la Jordanie, le Liban, Malte, le Maroc, les Pays-Bas, le Portugal, Royaume-Uni, la Suède, la Syrie, la Tunisie, la Turquie et l'Autorité Nationale Palestinienne. On remarque l’absence des Etats-Unis, mais la présence d’Israël, et le fait que les pays arabes constituent un tiers (9 sur 27) de cette assemblée, outre qu’ils peuvent compter sur le vote solidaire de pays tels que l’Espagne, Chypre, la Finlande, la Grèce, Malte, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède, qui ont prouvé dans le passé qu’ils se rangeaient souvent aux côtés des pays arabes en matière géopolitique.
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Mis en ligne le 29 mars 2006, par M. Macina, sur le site upjf.org