Les Bahaiis craignent une persécution à grande échelle
22.03.2006
Des représentants de la Communauté internationale Bahaii ont réagi aujourd’hui suite à un rapport officiel des Nations Unies au sujet des exactions du gouvernement iranien contre les Bahaiis en Iran.
Le rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté religieuse ou la croyance, Asma Jahangir, a déclaré qu’elle se sentait concernée et a exprimé ses craintes dans un communiqué de presse signalé aujourd’hui au sujet « d’une lettre confidentielle envoyée le 29 octobre 2005 par le commandement en chef des forces armées en Iran à un certain nombre d’agences gouvernementales ».
Elle dit : « Cette lettre du chef suprême adressée au ministère de l’information, aux gardes révolutionnaires et aux forces de polices, demande d’identifier les personnes qui adhèrent à la foi Bahaii et de surveiller leurs activités. La lettre continue pour demander confidentiellement aux destinataires de rassembler toutes les informations sur les Bahaiis.
« Nous sommes reconnaissants à Mme Jahangir d’avoir mis ce fait en évidence », a dit Bani Dugal, la principale représentante de la communauté Bahaii à l’Onu. « Nous partageons son souci pour le bien-être des Bahaiis et sa crainte de ce que ceci pourrait signifier. En raison du caractère sans précédent de l’action du gouvernement, nous adressons une demande d’explication à l’ambassadeur d’Iran ».
Mme. Jahangir considère également qu’une telle surveillance constitue une interférence interdite et inacceptable avec les droits des membres des minorités religieuses. « La crainte du rapporteur spécial de voir cette lettre servir de base pour la plus grande persécution contre les Bahaiis est bien fondée », a dit Mme Dugal.
De telles actions font suite à des attaques dans les médias sur les Bahaiis, qui déjà dans le passé ont précédé des attaques gouvernementales envers les Bahaiis d’Iran. « Kayhan », le journal quotidien officiel de Téhéran a écrit plus de 30 articles, tous diffamatoires concernant les Bahaiis et leur religion ces dernières semaines. Des émissions de radio et TV se sont aussi jointes à la condamnation des Bahaiis. En outre, l’augmentation de l’influence des cercles gouvernementaux iraniens dans la société anti-Bahaii, Hojjatieh, une organisation investie dans la destruction de la foi Bahaii, accroît les craintes d’une communauté cernée.
« Nous savons où cette propagande détestable peut mener ; l’histoire récente offre trop d’exemples de ses conséquences terrifiantes. Nous adressons un appel pressant à toutes les nations et peuples au nom de nos coreligionnaires iraniens afin de ne pas permettre à un peuple pacifiste et respectueux des lois de devoir à faire face aux extrémités auxquelles la haine peut mener », a dit Mme Dugal. « Aujourd’hui on ne devrait plus permettre que des faits qui se sont développés dans des circonstances semblables par le passé puissent se reproduire. Plus jamais ça ».
Les attaques récentes des médias contre les Bahaiis en Iran au cours des derniers mois se sont développées. De septembre à novembre 2005 le journal Keyhan à lui seul a sorti trois douzaines d’articles diffamant la foi des Bahaiis avec la claire intention d’éveiller chez ses lecteurs des sentiments de soupçon, de méfiance et de haine envers les Bahaiis. Les articles s’engagent dans une déformation délibérée de l’histoire, se servant de faux documents historiques, et décrivant faussement les principes moraux des Bahaiis en les montrant blessants envers les musulmans. Avant le début des campagnes gouvernementales précédentes de persécution contre les Bahaiis, comme en 1979 (après la révolution islamique), de tels articles et programmes radio avait déjà été diffusés pour développer les animosités et les rancoeurs et apparemment préparer le public à ce qui devait arriver.
La société (anti-Bahaii) de Hojjatieh Mahdavieh a été fondée par Mahmoud Halabi à Machhad en 1953 (sous Mossadegh qu’il soutenait contre le Chah) pour lutter spécifiquement contre le Bahaïsme. En 1963, cette société intégriste était au côté de Khomeiny quand ce dernier se révolta contre les réformes du Chah pour moderniser le pays. Khomeiny fut exilé et les dirigeants de Hojjatieh Mahdavieh ont été emprisonnés.La société est réapparue en 1978/79 avec la révolution islamique. Halabi, vieux compagnon de Khomeiny, a alors voté pour l’établissement du système de Velayat é Faqih (Tutelle du Guide Suprême : Khomeiny).
Cependant ses membres restaient discrets à propos de leur appartenance à cette société : les plus connus sont Ahmad Azari-Qomi, Ali-Akbar Parvaresh, Mohammad Reza Mahdavi-Kani (qui a validé le faux testament [1] qui nommait Khamenei comme remplaçant de Khomeiny), Abolqasem Khazali, et Ali Akbar Nateq-Nouri (qui a servi de faux challenger à Khatami en 1997 [2]).
La société Hojjatieh et ses membres ont toujours servi les intérêts du régime des mollahs. Cependant la doctrine de Hojjatieh a gêné Khomeiny qui les a été critiqués publiquement le 12 juillet 1983 et la société a alors pris la décision de se dissoudre volontairement.
On peut dire qu’elle a choisi de se mettre en veille en tant que cercle d’influence, mais ses membres sont restés actifs et proches du pouvoir. Initialement, la société prêchait aussi l’encouragement du vice pour accélérer la venue du 12e imam [3] (Mahdavieh, étym. Mahdi), mais il semble que son côté clandestin soit devenu un atout pour les mollahs qui comptent l’utiliser pour créer une ligne « ultra dure » et compléter le panel politique du régime qui disposera ainsi de toutes sortes de tendances « politiques ».
Le régime des mollahs a besoin d’un nouveau bouc émissaire et la communauté des Bahaiis fera les frais de l’affaiblissement du régime qui a besoin de montrer sa puissance et frapper fort.
C’est pourquoi, les mollahs réaniment cette société Hojjatieh. En effet, les mollahs veulent prévoir une porte de sortie. Si cette persécution s’avérait nécessaire pour terroriser la population, ils n’hésiteraient pas à donner l’ordre d’abattre ou d’arrêter les Bahaiis, mais néanmoins ils désirent en faire adosser la responsabilité à un obscur organisme « interdit ». L’enjeu n’est pas le 12e Imam, mais la survie du régime des mollahs !
Les sanctions se rapprochent et les mollahs doivent montrer qu’ils sont toujours féroces.
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[1] À la mort de Khomeiny, les hauts responsables du régime se sont réunis pour décider de sa succession. Peu avant sa mort, Montazéri avait été écarté par Khomeiny, mais il restait le plus qualifié d’entre tous. Certains penchaient pour une solution différente et voulaient créer un Conseil (de trois ayatollahs) qui assumerait le rôle du Guide de la Révolution. Rafsandjani a falsifié avec l’aide d’Ahmad, le fils de Khomeiny, un testament dans lequel Khomeiny avait nommé comme son successeur Khamenei. La participation d’Ahmad a été décisive car ce dernier était le secrétaire particulier de Khomeiny. Khomeiny dictait ses ordres et Ahmad transcrivait : ainsi la totalité des documents attribués à Khomeiny vers la fin de sa vie avaient été rédigés de la main même de son fils Ahmad. Hojjat-ol-Eslam Rafsandjani (il n’est pas ayatollah) et Ahmad ont rédigé « le nouveau testament » au moment même où on s’acheminait vers la Création du « Conseil à trois ». Le texte stipulait que le fondateur de la République Islamique avait choisi Khamenei. Ce qui fit clore les débats et plaça un homme mou du giron de Rafsandjani à la fonction suprême de la république des mollahs.
[2] Depuis les dernières élections présidentielles en Iran, les Européens ont appris que les candidats étaient présélectionnés pour répondre à des critères islamiques. La sélection permet de prédéterminer l’issue des élections. Ainsi en 1997, le pouvoir avait présélectionné Khatami, un mollah peu connu, souriant, porteur de promesses populaires et un deuxième candidat, Nateq-Nouri, membre de la société Hojjatieh et parmi les plus réactionnaires, provoquant du même coup un 21 avril en faveur du discours inédit et optimiste de Khatami Les Faits qui ont conduit à présélectionner Khatami : En 1997, Rafsandjani, alors président de la république islamique était sous mandat d’arrêt International suite à l’affaire de la Tuerie du MYKONOS en 1992 (du nom d’un Restaurant Berlinois). Le mandat d’arrêt international de l’Interpol empêchait ce dernier de voyager et de représenter convenablement le régime. L’affaire avait nuit « aux affaires ». Il ne fait aucun doute que l’approbation de la candidature de Khatami à la présidence n’avait pas été sans rapport avec les sanctions internationales contre Rafsandjani. L'étiquette politique du Khatami a redonné un éclat politiquement correcte à la république islamique et dès 1997, les affaires ont repris notamment avec le retour de Total-Elf-Fina en Iran.
[3] Dans le chiisme, le retour du 12e Imam disparu en 873, sauvera le monde et marquera l’avènement de la justice sur terre. Auparavant ce dernier tuera tous les mécréants et les pêcheurs, jusqu’au dernier. Leur sang couvrira la surface de la terre et le Mahdi s’arrêtera quand les flots de sang lui arriveront «pile-poil» à la hauteur des genoux... (alors qu'il monte son cheval !) ... La référence à « l'Imam caché ou Mahdi » fait florès dans les discours officiels de la révolution islamique. D’ailleurs, les partisans de Khomeiny scandaient en 1979 : «Dieu préserve Khomeiny, jusqu'à l'avénement de Mahdi !»