25.2.09

Ce dont Bibi a besoin pour être Bibi


Par Caroline B. Glick
Adaptation française de sentinelle 5769


Qui se souvient des bons vieux jours où Kadima était jeune et proclamait fièrement son identité comme le seul parti politique qui ne tenait à rien ? Deux jours avant les élections de 2006, Meir Sheetrit de Kadima annonçait avec emphase que son parti était le seul parti en Israël qui « s’était désengagé de l’idéologie ».

Mais voyez Kadima aujourd’hui. En ce qui concerne Tzipi Livni, l’idéologie est tout ce qui compte. Ne songez pas que son idéologie – de céder la terre aux Palestiniens – ait été totalement discréditée par la victoire électorale du Hamas et sa prise du pouvoir à Gaza qui a suivi. Ne songez pas que l’affirmation de Kadima : l’établissement d’un Etat palestinien est la clé pour résoudre tous les problèmes d’Israël, ait été dépassée par l’élévation de l’Iran à l’hégémonie régionale, et l’aspiration à la puissance nucléaire dédiée à l’éradication d’Israël.

Comme Livni l’a formulé dimanche alors qu’elle rejetait la demande du Premier Ministre désigné Benyamin Netanyahu que Kadima se joigne à son gouvernement comme partenaire loyal : « si nous nous compromettons et cédons sur notre idéologie en nous joignant à un gouvernement dans une voie qui n’est pas la nôtre, cela violerait la confiance de nos électeurs ».

Pour essayer d’inciter Kadima à mettre de côté sa nouvelle ferveur idéologique, Netanyahu a prêté l’oreille au passé du parti qui, selon les mots de Sheetrit, « ne portait pas le poids d’un bagage idéologique, et ne regardait que l’avenir ». Netanyahu argumenta que puisque aujourd’hui, il n’y a aucune chance d’établir un Etat palestinien vivant en paix avec Israël, Kadima peut laisser de côté ses différences avec le Likoud et coopérer à empêcher l’Iran d’acquérir des armes nucléaires, à renverser le régime du Hamas à Gaza et protéger l’économie d’Israël contre la chute de l’économie mondiale. Mais Livni n’aura rien fait du tout.

Depuis que Livni est devenue une post-sioniste radicale, et même depuis qu’elle entrepris sa conversion de la Droite à la Gauche en 2004, sa position est compréhensible. Moins compréhensible, la volonté opportuniste des membres de son parti de la soutenir. Comment expliquer leur inclinaison à abandonner leurs ministères moelleux pour les bancs de la Knesset ?

Depuis l’élection, les dirigeants de Kadima, leurs amis de Gauche du Parti travailliste et du Meretz et des Media ont tous clamé que la coalition de Droite de Netanyahu n’est pas durable. La présidente de la Knesset, Dalia Itzik a même suggéré que Kadima ne jette pas son matériel de campagne parce que de nouvelles élections se dérouleront dans moins d’un an.

De leur côté, ces affirmations ont peu de sens. Une coalition de Droite comprendra 65 membres de la Knesset qui n’ont pas d’autre choix. Pour quelle raison seraient-ils d’accord pour de nouvelles élections ?

Mais Livni et ses collègues ont trois formidables atouts donnant du crédit à leur prétention : l’administration Obama, le Président Shimon Peres, et le chef d’Etat Major Général de Tsahal, le Lt-Général Gaby Ashkenazi. Si ces forces agissent de concert pour s’opposer à Netanyahu, sa capacité à gouverner et à rester à son poste sera en effet significativement diminuée.

Au cours de la semaine passée, l’administration Obama a pris une série de mesures qui montre qu’elle se prépare à augmenter la politique traditionnelle des USA de pressions sur Israël pour l’amener à des concessions sans réciprocité de ses voisins arabes, à un niveau inconnu jusqu’alors. Alors que l’administration Bush rejetait la légitimité du groupe terroriste Hamas soutenu par l’Iran, l’administration Obama a donné cette semaine trois signes de sa volonté de reconnaître un régime palestinien dirigé par le Hamas. D’abord, son délégué, le sénateur John Kerry, qui préside la Commission des relations extérieures du Sénat, a visité Gaza contrôlé par le Hamas, et il a ainsi reconnu effectivement le ‘protectorat’ du Hamas. Pendant son séjour, il a accepté une lettre du Hamas au Président Barack Obama, et l’a dûment remise au consulat des USA à Jérusalem.

Ensuite, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton a annoncé qu’elle participera à la conférence parrainée par l’Egypte le mois prochain, avec pour objectif de lever des fonds pour reconstruire Gaza contrôlé par le Hamas, à la suite de la guerre provoquée par l’envoi de missiles contre Israël. C’est la première participation volontaire des USA à la levée de fonds depuis que le Hamas s’est emparé du pouvoir en juin 2007.

Enfin, le dirigeant du Fatah Mahmoud Abbas a décidé de participer aux négociations destinées au rétablissement d’un gouvernement d’unité Hamas-Fatah. Abbas a déclaré que les USA soutiennent désormais un tel gouvernement qui ferait de nouveau du Fatah le partenaire junior du Hamas. La reconnaissance par les USA d’un tel gouvernement constituerait de leur part la reconnaissance de la légitimité du Hamas.

Et puis il y a eu la visite de Kerry en Syrie. Non seulement Kerry a-t-il indirectement félicité la Syrie pour son soutien au Hamas en louant sa volonté de soutenir un gouvernement palestinien dans lequel le Hamas jouera le rôle dirigeant, mais il appelé à l’abandon de la décision de l’administration Bush de rappeler son ambassadeur de Damas, après que les Syriens aient supervisé l’assassinat de l’ancien Premier Ministre libanais Rafik Hariri en février 2005.

La volonté d’Obama de négocier avec le Hamas et la Syrie est une partie de sa conviction apparente que la raison principale de l’hostilité des mondes arabes et islamiques envers les USA provient du soutien des USA à Israël. La notion que Obama reproche à Israël la haine arabe et islamique contre les USA a gagné en crédibilité cette semaine quand on a rapporté qu’il a l’intention de nommer l’ancien ambassadeur des USA en Arabie saoudite Chas Freeman au poste de directeur du très influent Conseil National du Renseignement.

Freeman est connu pour son animosité virulente à l’égard d’Israël. Dans de nombreuses déclarations publiques, il a mis toute la faute de l’hostilité arabe et islamique à l’égard des USA sur Israël, et a prétendu que les conflits des USA avec les Arabes disparaîtront à la minute où les USA abandonneront Israël.

Lors d’une telle déclaration en 2007, Freeman, qui loue le Hamas pour son « élection démocratique », a déclaré : « ceux dans la région et au-delà qui détestent le comportement d’Israël, ce qui signifie pratiquement tout le monde, étendent maintenant naturellement leur répugnance aux Américains, légitimant l’islamisme radical, en permettant à l’Iran de prendre pied parmi les Arabes sunnites aussi bien que les shiites ».

En refusant de se soumettre à ses ennemis arabes, Freeman met en avant que Israël a gagné leurs représailles courroucées. Et il prétend que cela constitue aussi un danger pour les Américains. Selon ses termes, « de telles représailles – quelles que soient leurs formes – auront le soutien ou au moins la sympathie de la plupart des gens de la région, et de beaucoup d’autres au dehors. De là, l’escalade du terrorisme à long terme contre les USA est une certitude, et pas une conjecture ».

Le Président Shimon Peres pour sa part ne partage pas l’enthousiasme de Washington pour la Syrie, ou son animosité à l’encontre d’Israël. Mais il croit vraiment qu’Israël peut et doit en faire plus pour établir un Etat palestinien. Comme chef incontesté de la Gauche israélienne, vendredi, Peres a fait une sortie en faveur du soi-disant « plan de paix saoudien ». Lors d’un entretien indirect et servile avec le commentateur politique du journal ‘Ma’ariv’ Shalom Yerushalmi, Peres a adhéré à l’initiative saoudienne, qui appelle à un retrait israélien aux lignes d’armistice indéfendables de 1949, et à accepter des millions d’Arabes étrangers hostiles comme partie du soi-disant « droit de retour ».

Aussi bien dans l’entretien que dans ses remarques avant et après les élections, Peres s’est posé en rempart contre un gouvernement non dirigé par la Gauche, qui voudrait mettre en veilleuse la question d’un Etat palestinien. Comme Livni, malgré le fait qu’il n’existe pas de dirigeant palestinien ayant la volonté de vivre en paix avec Israël, Peres insiste pour dire que le défi le plus pressant d’Israël est d’établir un Etat palestinien.

Dans leur tentative de discréditer le gouvernement Netanyahu, Peres et Obama se réjouiront apparemment du soutien du chef d’Etat Major Général de Tsahal, Gabi Ashkenazi. Selon un rapport de ‘Ma’ariv’ vendredi, celui-ci a adhéré au défaitisme comme stratégie nationale. Le commentateur diplomatique de ‘Ma’ariv’ Ben Caspit a rapporté que Ashkenazi déclare que bien qu’il soit vrai qu’Israël possède la capacité de retarder significativement le programme nucléaire de l’Iran, il n’est pas nécessaire de le faire.

Selon Caspit, en ce qui concerne Ashkenazi, plutôt que de supprimer la menace immédiate à sa survie, Israël devrait chercher le compromis avec sa marionnette arabe – Assad. Ashkenazi croirait que Israël doit laisser l’Iran en paix, et prier Obama de convaincre Assad d’accepter les Hauteurs du Golan de la part d’Israël. Lorsque Assad détiendra le Golan, Ashkenazi affirme qu’il cessera de pointer sur Israël ses missiles armés de têtes biologiques et chimiques, de soutenir le Hamas et le Hezbollah, et de façon générale, deviendra un membre de bon aloi de l’alliance occidentale. Pourquoi la Syrie ferait cela, alors qu’elle devrait la cession par Israël des Hauteurs du Golan à son alliance avec l’Iran, voilà une question qu’Ashkenazi n’a pas jugé bon d’envisager.

Ashkenazi est loué par les media de Gauche comme apolitique, mais cela est faux. Le chef d’Etat Major Général est extrêmement proche de l’ancien chef d’Etat Major de Tsahal, Amnon Shahak, qui a signé l’initiative post-sioniste de Genève en 2004, et a établi des partenariats d’affaires avec des dirigeants du Fatah.

En tant que chef d’Etat Major Général pendant le premier mandat de Netanyahu comme Premier Ministre, Shahak s’est ouvertement rebellé en refusant de le rencontrer, ou d’assister à des réunions du cabinet. Shahak a annoncé un échec de tentative pour renverser le Premier Ministre Netanyahu peu après sa retraite du service militaire en 1998.

Ashkenazi, qui a mentionné Shahak en tant que "coach professionnel" après avoir remplacé Dan Halutz comme Chef d’Etat Major Général en 2007, partage clairement ses opinions politiques. Il s’est opposé à combattre le Hamas jusqu’à ce que ses missiles ne commencent à arroser Ashdod, il soutient la signature d’un nouveau cessez-le-feu avec le Hamas aujourd’hui, ce qui confèrera la légitimité israélienne à ce groupe terroriste, et il a soutenu l’interruption de l’opération « Plomb coulé » sans avoir renversé le Hamas au préalable, ou avoir diminué significativement sa capacité à contrôler Gaza.

Ashkenazi est aussi très proche de l’ancien chef du renseignement militaire de Tsahal, Uri Saguy. Depuis la mi-1990, Saguy, qui possède de grandes propriétés terriennes en Galilée, a été l’un des plus grands champions de la cession par Israël des Hauteurs du Golan. Comme Shahak, Saguy sert de mentor officieux d’Ashkenazi.

Caspit a déclaré que juste après la formation du gouvernement de Netanyahu, Ashkenazi se propose de lui dire que Tsahal refuse la notion même d’attaquer l’Iran. C’est-à-dire, selon Caspit, en arrivant à son poste, Netanyahu trouvera un chef d’Etat Major Général se tenant au coude à coude avec Obama et Peres dans une tentative pour le renverser

Ne vous étonnez pas que Kadima ait désormais trouvé une idéologie.

Si Netanyahu veut survivre à son poste et accomplir vraiment les objectifs clairs qu’il a fixés à son gouvernement, il doit commencer par vendre de façon dynamique son programme au public. Ce faisant, il construira le type de crédibilité publique dont il a besoin pour empêcher Ashkenazi de se rebeller contre lui. Ashkenazi mis sur la touche, Peres et Obama disposeront d’une moindre capacité directe pour empêcher Israël d’attaquer l’Iran.

Pendant la campagne, Netanyahu a choisi de garder profil bas sur ses espoirs de neutraliser les critiques des media en déniant leurs titres. A ce moment-là, il y avait une justification à cette stratégie. Mais maintenant qu’il forme le prochain gouvernement, le public doit savoir pourquoi il veut ce qu’il projette de faire et pourquoi nous devons le soutenir. Autrement, Kadima a raison. Il n’y a pas de raison de se joindre au gouvernement.