Ces argumentaires, ces délires, ces images prises sur le vif, tout est beau à la CAPJPO.
Si le site de cette association ne peut pas encore concurrencer Youtube ou Dailymotion, ce n’est pas faute d’avoir essayé.
Depuis quelques jours, Olivia Zémor et sa petite bande tentent à nouveau d’exister : ils ont mûrement réfléchi la décision spontanée de se mettre en colère. Après une séance du conseil d’administration particulièrement soporifique ?
Une autre explication court les ruelles. Des rumeurs en effet circulent selon lesquelles la CAPJPO a besoin de se refaire une santé financière après ses fours successifs (concerts géants et autres manifestations grand public). Encore que, au vu de l’affluence à leurs meetings ces dernières années, le terme « grand public » n’est pas bien adapté.
Les thèmes des réunions de cette association tournent tous autour d’une problématique bien ciblée : la destruction d’Israël.
Bien entendu, ils ne le diront pas aussi crûment, aussi utilisent-ils la locution « Paix Juste au Proche Orient » (PJPO donc) qui signifie dans leur esprit exactement la même chose, étant entendu que la Paix Juste, selon eux, ne pourra se faire qu’avec un Israël pieds et poings liés devant ses ennemis séculaires et – qui plus est – dépossédé d’une portion significative de son territoire.
Le CA de CAPJPO signifie « Coordination des Appels », pas « Comité d’Action ». Tant mieux, car les actions manquent singulièrement pour regonfler le moral des troupes. Là encore, il convient de ne pas prendre le mot « troupe » dans son sens littéral puisque cette association peine à réunir quelques dizaines de personnes, score obtenu à l’issue d’une immense campagne sur Internet.
Imaginons : C’est au sortir d’un CA bien arrosé, si toutefois la vie statutaire de l’association s’abaisse à ce type d’événements démocratiques superflus. Décision a été prise de s’en prendre à l’image d’un homme au moins, un Franco-israélien enlevé sur le territoire d’Israël et dont la famille est sans nouvelles depuis plus d’un an, Guilad Shalit.
Depuis quelques semaines, un modeste panneau invitait les Parisiens à se souvenir de leur concitoyen embastillé dans des conditions inconnues.
Les dernières super-productions capjpesques permettent d’admirer en vidéo sur le site de l’association la dégradation de ce bien public appartenant à la Mairie de Paris.
Un premier film (visionner) les montre en train de clouer sans aucune pudeur une banderole sur les portraits des 3 otages pendant la péroraison de la présidente Zémor.
Sur le plan purement filmique, il faut bien avouer que l’on est très déçu. Les dialogues ne correspondent pas à l’image. Les discours sont un peu trop longs et particulièrement redondants, sans aucun effet dramatique ni respiration, les plans de coupe ne respectent pas la grammaire cinématographique. Godard avait assez de génie pour s’affranchir de ces règles, la CAPJPO, elle, manque du talent le plus élémentaire.
L’un des principaux acteurs prend bien soin de cacher son visage derrière un seyant foulard palestinien, un keffieh, le même que portait Arafat lorsqu’il sortait en public. Ce louable souci de discrétion ne peut avoir d’autre origine que la pure modestie, n’en doutons pas !
Cette précaution est bien utile car son habileté à planter des agrafes sur les portraits des otages ne restera pas dans les annales. C’est l’exemple type du rôle à contre emploi. Ce courageux militant eut été plus utile au simple transport du porte-voix.
Quelques célébrités sont appelées à la rescousse : c’est ainsi qu’une affiche présente le sourire débonnaire de Théo Klein, ci-devant ancien président du CRIF et du fait de cette « qualité », un must pour les dîners mondains où l’on veut accuser Israël de tous les maux de la terre.
Olivia Zémor, probablement coiffée par Le-Ridicule-Ne-Tue-Plus.com, le coiffeur des stars virtuelles, tient le premier rôle, du début à la fin. Pour le maquillage de la diva, deux écoles divisent les exégètes : les uns estimant que, sans doute pressée par les cadences infernales imposées dans ce type de superproductions, la maquilleuse a eu la main un peu lourde, les autres argumentant que pour jouer Guignol, il convient d’arborer le fard à joues idoine.
C’est beau. C’est kitch. On dirait du Marguerite Duras quand elle filmait, ce qu’elle a malheureusement fait parfois.
La grande affiche qui invitait les parisiens à se souvenir est maintenant abîmée, gâchée, irrécupérable.
A la fin du film, le metteur en scène se permet toutes les audaces : le groupe de la CAPJPO s’éloigne dans la grisaille parisienne, filmé de dos afin d’accentuer le côté dramatique de la chose.
L’internaute essuie une larme, se dit qu’il a déjà vu cette scène, mais que le bonhomme était seul, avec une canne et un chapeau, ridicule lui aussi. C’était dans les années 30. Mais le comique était volontaire.
Il se demande également s’il y aura une suite et si oui, quand. Et il s’interroge tout aussi philosophiquement : n’est-il pas trop tard pour aller faire les courses ? Il manque du beurre pour demain matin.
CAPJPO, le retour
Le second film (visionner ici) commence sur un accent triomphal. Le monument municipal, vandalisé par les soins de la CAPJPO, n’est plus visible.
Et la CAPJPO (Europalestine pour les intimes, Mouvement Politique de son prénom) annonce « la mobilisation a été payante. La mairie de Paris retire les panneaux d’apologie de crimes de guerre ».
La caméra glisse discrètement sur un petit panneau qui indique « suite à diverses dégradations, les portraits ont été momentanément retirés afin de procéder à leur remise en état ».
Retirés, ils ont dit « retirés » ? Mais la mairie de Paris ne les a pas retirés, elle les a MOMENTANÉMENT enlevés pour procéder à leur réparation. Bah, retirés, réparés, la CAPJPO n’en est plus à une confusion ou à un mensonge près !
Ce second film, que certains distributeurs ont déjà sous-titré « Les crétins en vadrouille : le retour » prétend exiger la libération d’un prisonnier des geôles israéliennes. Cet épisode a, semble-t-il, bénéficié de moyens plus importants. Les décors sont soignés. Une élégante construction en bois, qui n’est pas sans rappeler une cabane de jardin des bords de Marne, a été édifiée.
Les figurants sont un peu plus nombreux. La CAPJPO a rameuté à cette occasion plusieurs syndicats et partenaires. C’est le principe même de la co-production.
Au moins 70 personnes. La CAPJPO en annonce triomphalement 200. Un zéro de plus ou de moins, qu’importe à la CAPJPO ! Au sein de cette assemblée, des délégués du syndicat CGT des espaces verts de la Mairie de Paris tournent autour du monument, casque de chantier sur la tête : ça fait sérieux.
La star est un jeune homme chauve et bien mis. Il caricature un Bertrand Delanoë affublé d’une écharpe tricolore. C’est la grosse « poilade » : on avait perdu la 7ème compagnie, on a retrouvé la CAPJPO. On n’a pas gagné au change…
Olivia Zémor est toujours là. La ravageuse mise en plis du premier épisode est cette fois dissimulée sous un casque de chantier aimablement prêté par un des camarades syndicalistes présents. Le jaune affriolant va bien au teint de l’aigre pasionaria.
Pendant que la France se souvient des morts de la guerre 14-18, ce 11 novembre 2007, les membres d’Europalestine qui ont, avec le succès que l’on sait, brigué des suffrages lors de certaines élections, s’amusent dans cette pantalonnade grotesque.
Mais, comme souvent, ce qui était désopilant au premier épisode s’essouffle un peu dans le second. Il n’y a plus cette magie, cette folle spontanéité qui en avaient fait le charme. Les applaudissements sont clairsemés, peu enthousiastes.
« L’humour est une chose trop sérieuse pour être confiée à des imbéciles », disait un grand homme d’Etat. La CAPJPO aurait pu s’en inspirer...
Un arrière goût si acre
Sur les deux épisodes de la saison, l’impression générale est mitigée. Peu de conviction dans le jeu des acteurs, un scénario bâclé. Et au final, un sentiment fugace pour le spectateur : le but recherché n’était pas véritablement la libération d’un prisonnier franco-palestinien, Salah Amouri, mais plutôt la destruction d'une démocratie.
Plusieurs remarques, qui ont manifestement échappé aux participants de ces lamentables équipées :
Salah Amouri, que la CAPJPO prétend soutenir, dispose du soutien d’avocats israéliens, en général payés par l’Etat hébreu et par certains Israéliens attachés à la Paix. Il peut recevoir sa famille régulièrement. Il peut donner de ses nouvelles, écrire à sa mère et recevoir des visites. C’est comme cela dans un Etat de droit.
Guilad Shalit à Gaza, lui, n’a pas ces facilités. Depuis plus d’un an qu’il a été enlevé, aucune nouvelle de lui n’est parvenue au monde civilisé. Corollairement, aucun soin ne lui a été apporté. Ce n’est pas la Croix-Rouge qui se serait battue avec acharnement pour lui apporter le minimum auquel la Convention de Genève lui donne droit. Il est, paraît-il, enfermé dans une maison piégée pour prévenir une libération par la force.
D’Ehud Goldwasser et de Eldad Regev, on croit savoir qu’ils ont été amenés en Iran par les bons soins du Hezbollah. On sait, depuis la disparition de Ron Arad, avec quelle prévenance ce mouvement traite les prisonniers juifs tombés entre ses mains.
Tout cela, la CAPJPO-Europalestine veut l’ignorer. Ce mouvement représente la quintessence de ce qui se fait de plus bas et éminemment abject dans le paysage politique et associatif français.
Tout bien considéré, pas si drôle que ça, la CAPJPO. Pas drôle, menteuse, manipulatrice et laide !
Il vaut mieux revoir « Le dictateur » de Chaplin et relire « Matin brun » de Franck Pavloff. Pour cela, encore faut-il savoir lire.
Pierre Lefebvre © Primo, 14/11/07
Auteur : Pierre Lefebvre
Date d'enregistrement : 14-11-2007