17.1.09
Cessez-le-feu unilatéral: le politique va-t-il saboter le militaire ?
Dès l’annonce par Israël de la perspective d’un cessez-le-feu unilatéral, des voix ont commencé à se faire entendre dans la classe politique pour avertir des dangers d’une issue bâclée de l’Opération « Plomb Durci ». L’unité nationale tacite affichée par les partis d’opposition depuis le début des opérations militaires commence à s’effriter. Craintes principales émises par l’opposition, mais aussi par des militaires qui se trouvent sur le terrain des opérations : le manque de garanties quant à la fermeture de l’Axe de Philadelphie, l’absence du dossier Guilad Shalit dans les négociations, et la victoire psychologique donnée au Hamas par un arrêt unilatéral israélien.
Pendant que le cabinet de sécurité était réuni ce samedi soir, le Likoud, le Ihoud Leoumi, Habayit Hayehoudi et Israël Beiteinou ont chacun émis leurs réserves, voire leurs critiques à ce qui ressemble d’après eux à une « fin précipitée d’une campagne qui avait pourtant bien commencé ». Le n°2 de Habayit Hayehoudi, Zevouloun Orlev, a décidé de recueillir les 25 signatures de députés nécessaires à convoquer une séance extraordinaire de la Knesset qui est actuellement en vacances parlementaires. « Un cessez-le-feu sans Guilda Shalit serait une décision foncièrement immorale et porterait atteinte à la motivation des soldats qui seront ultérieurement envoyés au front ». Au nom d’Israël Beiteinou, Avigdor Lieberman a été plus incisif : « Par le passé nous avons vu ce que donnent ce genre de cessez-le-feu qui se transforme rapidement en piège de feu. Alors que l’armée est motivée et que les habitants du sud font preuve d’un courage exemplaire, c’est une nouvelle fois le gouvernement qui hésite et veut empêcher Tsahal de finir sa mission. Si Israël ne fait pas plier le Hamas et ne reprend pas le contrôle du passage de Rafiah’, cette opération n’aura servi à rien. » Même son de cloche au Likoud, et pour le Ihoud Leoumi, Ouri Ariel a dit tout haut ce que d’aucuns pensent tout bas, à savoir que « ce cessez-le-feu est motivé par des raisons électoralistes ». Pour Ariel « ce gouvernement qui a attiré les tirs sur Sderot et Yavné en opérant le désengagement du Goush Katif, commet une nouvelle erreur en n’allant pas jusqu’à faire plier définitivement le Hamas ». Rappelons que dans la résolution 1701 votée après la Deuxième Guerre du Liban, un paragraphe interdisait « l’acheminement d’armes au Hezbollah par la frontière syro-libanaise », mais que ce texte est resté lettre morte.
De nombreuses interrogations quand ce ne sont pas des stupéfactions se sont également exprimées chez des militaires se trouvant à Gaza ou des habitants des localités du front, qui craignent que ce cessez-le-feu ne serve une nouvelle fois au Hamas pour se préparer à un nouveau round d’ici quelque temps.
C’est vers 22h45 que la réunion du cabinet s’est achevée, le Premier ministre et le ministre de la Défense sont apparus devant les micros et ont annoncé l’instauration du cessez-le-feu unilatéral dès 2 :00 dans la nuit de samedi à dimanche.
Ehoud Olmert, après avoir détaillé les acquis de Tsahal, a annoncé le cessez-le-feu tout en précisant que « Tsahal reste sur place et autour de la Bande de Gaza et réagirait avec force au cas où le Hamas comprendrait ce cessez-le-feu israélien comme une manifestation de faiblesse ». Il a tenu à rappeler « toutes les garanties apportées par les Etats-Unis, l’Egypte et certains pays de l’Europe pour éviter à l’avenir le réarmement du Hamas ».
Il a félicité le ministre de la Défense, Tsahal et les différents Services Secrets. Il a aussi adressé un hommage appuyé à Tsipi Livni, ministre de la Défense, au Président égyptien, aux habitants des localités du front pour leur courage, et aux familles endeuillées. Avant de conclure son intervention, il a adressé ses « regrets à la population civile de Gaza pour les pertes innocentes » en précisant que « c’est le Hamas qui était entièrement responsable de leur souffrance».
Prenant la parole après lui, le ministre de la Défense Ehoud Barak, a repris peu ou prou les mêmes thèmes, insistant toutefois davantage sur l’aspect militaire des choses, et l’avertissement donné au Hamas au cas où il poursuivait ses tirs : « A ce moment-là, l’opération se poursuivrait et s’élargirait ».Il a également demandé à la population des localités du front de ne pas tomber dans l’insouciance car « la sécurité n’est pas encore garantie ».
Il a justifié l’entrée en guerre d’Israël par « l’échec de toutes les autres tentatives de faire cesser les tirs des terroristes » et a avoué aussi « l’échec du désengagement du Goush Katif qui a profondément blessé la société israélienne mais sans donner les fruits escomptés ».
Il a cité nommément les dix officiers et soldats qui ont perdu la vie dans cette opération, ainsi que les trois civils. Tout comme le Premier ministre, il a rappelé « que Tsahal ne visait pas la population civile de Gaza, prise en otage par le Hamas » et « les millions d’appels téléphoniques effectués et tracts distribués pour prévenir les civils palestiniens de quitter les endroits qui allaient être bombardés ».
Ehoud Barak, tout comme Ehoud Olmert ont rappelé Guilad Shalit, promettant « que les choses avaient avancé, et que tout serait fait pour obtenir sa libération ».
Décision judicieuse ou regrettable ? Les jours diront…
par Shraga Blum
arouts sheva