18.10.08

Jackson traduit-il les intentions d’Obama ?



par Shraga Blum
arouts sheva

Le Révérend Jesse Jackson, connu pour ses déclarations choc et son inimitié pour Israël, a-t-il « simplement » exprimé ses désirs, ou a-t-il jeté à terre le masque de Barack Obama ?

Le New York Post révèle que lors d’un Forum sur la Politique Mondiale, qui se tenait ce week-end à Evian, le militant des Droits Civiques a fait ces déclarations lourdes de sens : « Avec l’élection de Barack Obama, la politique étrangère des Etats-Unis va profondément changer. Les Etats-Unis vont tourner le dos à des décades de contrôle sioniste. Les Sionistes sont encore forts à Washington, mais leur influence va prendre un sacré coup dès qu’Obama aura franchi les portes de la Maison Blanche. Jusqu’à présent, c’était uniquement l’intérêt d’Israël qui guidait les décisions de l’administration américaine. Avec Obama ça va changer. Tant que les Palestiniens n’auront pas obtenu justice, le Proche-Orient constituera une source de danger pour nous tous».

Pour le Révérend, « lorsque Barack Obama parle de changement, il pense ce qu’il dit, et ce changement se sentira particulièrement sur le plan international. En tant que Musulman d’origine, il aura à cœur de restaurer l’image des Etats-Unis dans le monde musulman, durement ternie par la Guerre en Irak et le soutien de Bush à Israël ». Il a également soutenu la position d’Obama concernant l’Iran, « privilégiant le dialogue à la manière forte ».

Après la publication de ces propos, le candidat démocrate va devoir à nouveau tenter d’éteindre un incendie allumé par l’un de ses soutiens - une nouvelle fois un ecclésiastique - et une nouvelle fois à propos d’Israël ! La dernière fois c’était son ami le pasteur Jeremiah Wright, duquel Obama avait du se désolidariser publiquement suite à des propos violemment antisionistes et antisémites. Il est certain également que ces déclarations seront présentes au troisième et dernier débat qui opposera ce mercredi soir les deux candidats à l’élection présidentielle.

La réaction juive ne s’est pas fait attendre. David Harris, président de la AJC (American Jewish Committee) a publié un communiqué condamnant les propos de Jackson mais surtout ce qu’ils laissent entendre : « Il s’agit d’un écho de l’antisémitisme classique à propos d’une sois-disant conspiration juive pour dominer la planète. Hélas, il ne s’agit pas de la première déclaration du genre de la part de Jesse Jackson. La réalité est toute autre. Les études montrent régulièrement que les Etats-Unis sont favorables à Israël car une grande majorité des citoyens américains, Juifs comme non Juifs voient en Israël un pays ami et allié, partageant de nombreuses valeurs communes avec les Etats-Unis ». Harris note toutefois avec satisfaction que « l’état-major de campagne de Barack Obama s’est immédiatement désolidarisé des propos du Révérend et a réaffirmé l’attachement d’Obama à la sécurité d’Israël ».

Mais il n’empêche que ce genre de propos ne manque pas de mettre mal à l’aise et de se poser des questions. Dans les élections, il y a certes le candidat lui-même, médiatiquement présent, mais il y aussi les très nombreux conseillers et experts, hommes de l’ombre mais qui modèlent sa politique. Et les idées exprimées à haute voix par Jackson sont monnaie courante dans les milieux démocrates américains. L’immense succès outre-atlantique du livre très critique « The Israel Lobby and US Foreign Policy » de John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, en est un signe.

Quel sera l’effet de telles déclarations sur l’électorat juif ? A moins de trois semaines des élections, chaque voix compte, et chaque secteur est courtisé. Les Républicains vont insister sur les risques « d’aventurisme diplomatique » au cas où Obama est élu, alors que les Démocrates vont mettre en avant le traditionnel soutien d’Israël par les administrations démocrates.

Mais quoi qu’il en soit, si le sénateur de l’Illinois entre à la Maison-Blanche, s’y faufileront avec lui de nombreux éléments qui ne sont pas parmi nos meilleurs amis.

Et en ce contexte de crise et d’instabilité financière, il convient de se poser la traditionnelle question : « Est-ce bon pour nous ? »