28.10.08
Raid américain en Syrie : les réactions
Par Itaï Smadja
pour Guysen International News
Selon plusieurs média syriens, dimanche 26 octobre vers 17h00 locales, l'armée américaine a mené un raid en territoire syrien près de la frontière avec l'Irak. La Syrie a accusé les Etats-Unis d’avoir tué au moins huit personnes durant ce raid héliporté. Alors que dans un premier temps les forces internationales de la coalition présentes en Irak ont affirmé ne pas avoir d’information à ce sujet, d’autres sources ont par la suite apporté davantage de détails. Il semblerait que les cibles visées étaient des camps d’entrainements pour des terroristes destinés à combattre en Irak. Quoiqu’il en soit, les réactions ont été immédiates.
L'agence Associated Press, qui affirme être entrée en contact par téléphone avec des témoins de l'attaque, stipule que ces derniers ont vu deux hélicoptères à bord desquels se trouvaient des soldats américains.
Ils auraient attaqué un village situé à environ 16 kilomètres de la frontière irakienne et à un peu plus de 500 km de Damas.
Le raid intervient dix jours après l’arrestation par les forces irakiennes de sept Syriens accusés de terrorisme en Irak.
A l’annonce de ce raid, les réactions n’ont pas tardé. En Irak, les forces internationales présentes, composées à 95% d’Américains, ont d’abord affirmé que « les forces de la coalition internationale, dans leur ensemble, n'ont aucune information sur l'incident en Syrie ».
Toutefois, selon d’autres renseignements, l’opération militaire avait pour cible des bases à partir desquelles des terroristes s’entrainaient pour combattre en Irak.
Allant à l’encontre des déclarations de la coalition, Ali Al-Dabbagh (porte-parole du gouvernement irakien) a annoncé que « l'endroit où a été mené le raid était le théâtre d'activités d'organisations anti-irakiennes se servant de la Syrie comme base-arrière pour des opérations en Irak ».
« Le gouvernement irakien était en contact avec la partie américaine sur cette attaque menée sur la frontière syrienne », a précisé le porte-parole dans un communiqué.
« L'Irak cherche à avoir de bonnes relations avec la Syrie et avait demandé au gouvernement syrien d'extrader un groupe basé en Syrie qui avait tué récemment 19 membres des services irakiens de sécurité dans un village frontalier. Ce groupe utilise la Syrie comme base-arrière pour lancer des attaques contre l'Irak », a ajouté M. Dabbagh.
La télévision « Al Arabiya » a confirmé par la suite cette information en affirmant que le raid avait été mené contre « une région fréquentée par des groupes considérés comme hors-la-loi ».
De son côté, le site « Youkal.net » croit savoir que le bombardement a visé un camp d’entrainement utilisé par le Hezbollah iranien pour former des combattants irakiens avant de les envoyer au front.
D’autres sources indiquent qu’il s’agissait de camps où étaient réceptionnés les combattants islamistes issus d’Afrique du Nord et d’autres pays arabes et islamiques, ainsi que de certaines banlieues européennes, avant de les convoyer en Irak.
Le gouvernement syrien a qualifié l’attaque de « sérieuse agression » et a émis une protestation officielle auprès des émissaires irakiens et américains à Damas.
«La Syrie condamne et dénonce cet acte agressif et fait assumer aux forces américaines la responsabilité de cette agression et toutes les conséquences qui en découleront», a indiqué un responsable gouvernemental cité par l'agence de presse officielle syrienne Sana.
Le ton est le même au journal gouvernemental Techrine :
« Les forces américaines venant d'Irak ont commis un assassinat de sang froid. Il ont commis un crime de guerre qui a tué huit ressortissants syriens civils dans un village calme à huit kilomètres de la frontière irakienne » peut-on lire dans ses colonnes.
En Israël, la discrétion prévaut. « Israël n'a rien à voir avec l'attaque américaine en Syrie », a affirmé lundi à la Knesset le ministre de la Défense Ehoud Barak, précisant que « ce raid s'inscrit dans la stratégie du monde libre qui mène une lutte sans merci contre le terrorisme islamiste ». Il n’a cependant pas précisé si Israël avait, ou non, été avertit de l’organisation de cette opération.
Selon Thabet Salem, analyste politique qui s’exprimait sur les ondes d’Al Jazeera « le gouvernement syrien redoutait des infiltrations sur son territoire au début de la guerre Irak. Jusqu’à présent, rien de tel ne s’était produit. Peut-être quelques cas isolés, mais rien de très grave par rapport aux huit morts de cette opération ».
« Je ne crois pas aux informations selon lesquelles la raid visait des combattants. La Syrie a déployé un grand nombre de militaires, et des barrages tous les 4 kilomètres le long de la frontière irako-syrienne. Selon mes informations, les Syriens ont arrêté au cours des dernières années entre 5000 et 6000 personnes qui essayaient de franchir la ligne de démarcation ».
De nombreuses questions restent donc sans réponse, et en particulier celle concernant le pourquoi d'une telle opération alors que l’administration américaine est en fin de mandat ? .