15.1.09

La guerre se gagne sur tous les fronts : l’offensive informationnelle d’Israël



Alors que de violents combats opposent Tsahal au Hamas sur la bande de Gaza, Israël a choisi d’en interdire l’accès aux journalistes. Cette décision participe au choix stratégique novateur d’étendre la guerre au champ informationnel et de cibler son offensive également sur l’opinion publique. Dans cette optique, le pays a privilégié deux axes majeurs : être la source principale d’informations sur l’opération « Plomb Durci » et utiliser pour sa diffusion des canaux assez inhabituels : le blogging et les vidéos. Un diplomate du Consulat israélien aux Etats-Unis, David Saranga, a répondu, dans un style elliptique (140 signes) aux questions des internautes.
Cette communication directe et interactive est complétée par une série de vidéos diffusées sur Youtube. On y voit, depuis des caméras embarquées, les frappes aériennes de Tsahal. En privilégiant ces modes de diffusion, l’Etat Hébreu rompt avec la tradition et sensibilise le public [1] en lui délivrant une information qui provient directement du champ de bataille ou des sphères décisionnelles. L’aspect monopolistique lui offre le choix des éléments diffusés et lui confère un certain pouvoir sur le public qui est, consciemment ou pas, tributaire de cette sélection.


Le pays prend toute la mesure de l’importance capitale de l’information en choisissant d’adopter cette stratégie. Sa diffusion ciblée est en effet d’une grande importance pour obtenir le soutien de l’opinion publique. Et ce soutien est capital car lui seul peut faire basculer une victoire militaire vers la défaite médiatique. C’est à leurs dépens que les Américains l’apprirent lors de la Guerre du Vietnam. Le succès des offensives armées n’a pas suffi à rassurer une population à qui la presse ne faisait parvenir que des nouvelles terriblement alarmistes. Un très bon reportage, Vietnam, la trahison des médias, a soulevé avec clairvoyance ce délicat problème auquel Israël semble avoir trouvé une réponse catégorique.
Afin d’éviter que la diffusion d’information sur son offensive ne se fasse à ses dépens, l’Etat Hébreu a préféré en maîtriser la quantité et la qualité.
Cette stratégie ne lui offre toutefois pas le monopole de la communication. Des voix pro-Hamas ou pro-palestiniennes échangent tout de même sur le brûlant sujet. En plus d’attiser la compassion du public, elles cherchent à faire naître un doute sur le comportement israélien à Gaza. Se cacher des caméras inquiète et c’est un autre point faible de la stratégie bien exploité par l’opposition.

Face à des nouvelles délivrées au compte goutte, un flot ininterrompu d’articles, blogs ou vidéos déferle sur internet. C’est une guerre informationnelle, une guerre asymétrique dont l’issue n’est pas connue aujourd’hui. L’opposition frontale des deux modes de communication peut jouer en la défaveur d’Israël qui ne maîtrise finalement que partiellement les éléments diffusés. Le doute persiste quant à la façon dont le pays va réussir à gérer son image contre une information aussi libre que sa communication est restrictive. Sa stratégie finira-elle par se retourner contre lui ?

Julie Branère

[1] En choisissant de diffuser des images de guerre, qui émanent directement d’un champ de bataille et qui sont émises par l’armée, Israël donne une information assez crue qui doit toucher plus directement et plus violement le public.
Certaines des vidéos postées sur Youtube ont d’ailleurs été retirées car les administrateurs ont jugé qu’elles avaient un contenu choquant ou inapproprié.