13.2.09

Le directeur de la télévision Al-Arabiya au sujet des prochaines élections en Iran : il n'y a pas lieu d'espérer la victoire de Khatami


La semaine dernière, l'ancien président iranien Mohammad Khatami a annoncé sa candidature aux élections présidentielles iraniennes, prévues en juin 2009. En réaction, Abdul Rahman Al-Rashed, directeur d'Al-Arabiya et ancien directeur du quotidien londonien Al-Sharq Al-Awsat, a écrit un article paru dans Al-Sharq Al-Awsat, intitulé "Ne souhaitez pas la victoire de Khatami", où il qualifie les réformistes comme Khatami de "colombes sans ailes" précisant que "si un accord est signé [avec l'Iran], il faut que ce soit avec ceux qui détiennent réellement le pouvoir en Iran".

Ci-dessous l'article, paru dans la version anglaise d'Al-Sharq Al-Awsat : (1)

"(…) parier sur Khatami serait se méprendre, non en raison du dirigeant réformiste lui-même, mais plutôt du régime iranien"

"On sent son enthousiasme son intérêt ravivés à l'annonce de l'intention de l'ancien président iranien Mohamed Khatami de se présenter aux prochaines élections présidentielles.

Dans la longue lignée des dirigeants belliqueux, Khatami est généralement perçu comme un exemple de politicien iranien modéré épris de paix. Un jugement certes justifié, mais parier sur Khatami serait se méprendre, non en raison du dirigeant réformiste lui-même, mais plutôt en raison du régime iranien.

L'infrastructure politique iranienne est conçue pour ne pas permettre à un président élu comme Khatami – affilié à une coalition politique de grande ampleur et populaire mais de faible autorité – de diriger la grande politique iranienne de façon adaptée. On a pu le constater lors du dernier mandat présidentiel de Khatami, caractérisé par ses nombreux pas en arrière, devenus une source d'humiliation face aux partis extrémistes du régime. Les choses se sont dégradées à tel point que les journaux et magazines affiliés à Khatami ont été forcés de mettre la clé sous la porte, que les candidats de son parti ont été interdits de participation et ses employés harcelés, jusqu'à son départ de la présidence, sans avoir rien accompli de ce qu'il avait promis à ses électeurs."

"(…) il vaut mieux voir Ahmadinejad demeurer au pouvoir qu'espérer un président comme Khatami."

"En revanche, le personnage qu'est l'actuel président iranien Ahmadinejad appartient bien au régime au pouvoir et aux Gardiens de la Révolution, plus puissants et influents aujourd'hui que jamais par le passé, s'ingérant aussi bien dans les affaires intérieures qu'étrangères. En outre, il est plus proche [que Khatami] du dirigeant le plus puissant d'Iran : le Guide religieux suprême, l'ayatollah Ali Khamenei. C'est pourquoi il vaut mieux voir Ahmadinejad demeurer au pouvoir qu'espérer un président comme Khatami.

Les prochaines élections iraniennes ne seront pas de vraies élections, mais sont conçues pour satisfaire les besoins du régime iranien fondamentaliste, fermé aux éléments extérieurs. Ce régime a atteint [un tel niveau de] fanatisme qu'il a bloqué la candidature de deux mille islamistes aux élections législatives, ces derniers étant perçus comme des réformistes du style de Khatami. En outre, [la campagne] électorale avait une si faible marge de manœuvre que les candidats n'étaient pas autorisés à débattre ou à apparaître dans des campagnes publicitaires télévisées.

Nous apprécions l'attitude et les opinions des réformateurs tels que Khatami ainsi que leur esprit libéral qui permet une communication réaliste sur tous les sujets. Ces sujets incluent les problèmes épineux que sont leur programme nucléaire, leur présence dans les pays étrangers et les relations diplomatiques tendues. C'est pourquoi même en temps de désaccord, nous pouvons incontestablement coexister avec un régime dirigé par Khatami, ce qui n'était pas possible avec les précédents dirigeants à la ligne dure.

Le manque de confiance est le principal problème entre nous et les Iraniens. Ils affirment développer l'énergie nucléaire à des fins exclusivement pacifiques, alors que tout indique qu'elle sera utilisée à des fins militaires. Lugubre spectacle que celui des agissements politiques et militaires de l'Iran dans notre région."

"[Les réformateurs] sont une colombe sans ailes : si un accord est conclu, il faut que ce soit avec ceux qui détiennent véritablement le pouvoir."

"Les islamistes réformateurs [comme Khatami] représentent la meilleure option. Toutefois ils ne seront pas pour nous une grande source de satisfaction, même s'ils arrivent au pouvoir aux prochaines élections de printemps, parce qu'ils sont une colombe sans ailes : si un accord est conclu, il faut que ce soit avec ceux qui détiennent véritablement le pouvoir."

(1) Al-Sharq Al-Awsat (Londres), 10 février 2009.