22.5.08

BRUITS DE PAIX....POUR DE RIRE


On ne peut pas dire que la diplomatie française soit inactive, ces derniers temps. La question est de savoir si son approche est efficace et si elle ne se berce pas de mots et de vagues promesses.


Au Liban, il se pourrait, si le Hezbollah est d’accord, que l’on s’achemine vers l’élection d'un Président dans les heures qui viennent.

Le temps de nettoyer le Parlement et ses environs immédiats des gravats et autres salissures provoquées par des bombardements intempestifs et une vie recluse de la part de députés dont il faudra saluer, un jour, l’obstination et le courage.

Nicolas Sarkozy a beau fêter l'accord de Doha mettant fin à la crise politique au Liban, il ne fait aucun doute que celui-ci se conclut sur une victoire de fait du Hezbollah qui a refusé tout compromis.

Dans ces conditions, le « retour à un fonctionnement normal des institutions libanaises » est un cache-sexe qui masque mal l’emprise du mouvement islamiste sur ces institutions, dont l’armée.

Comme prévu, Nabih Berri, pro-syrien convaincu, a annoncé que le chef des armées, le général Michel Souleïmane, serait "élu président dans la semaine".

Le président élu au suffrage universel n’est pas la règle en notre monde, comme il est permis de le constater encore aujourd’hui. Mais cela permet d’annoncer la victoire électorale quelques jours à l’avance.

Gain de temps, lutte contre le gaspillage de l’argent public en frais de campagne prohibitifs, en sondages onéreux, le Liban va pouvoir respirer, si tout se passe bien. Et rien ne permet de penser que cela va mal se passer, le Hezbollah ayant à l’avance obtenu tout ce qu’il désirait.

Tout juste est-il question de renoncer à des campements de manifestants - appelés « sit-in » pour faire jeune par l’agence de presse syrienne SANA - aux points stratégiques de Beyrouth.

Pour le reste, le Hezbollah conserve sa télévision, ses médias, son propre réseau téléphonique ainsi que le contrôle de l’aéroport. Sans oublier qu’il n’est plus dans l’obligation de restituer ses armes et ses missiles. Pour une armée officieuse, c’est important.

Le texte de l’accord interdit tout recours aux armes à des fins politiques, affirment les diplomates. Cela va rassurer les Libanais qui savent combien il est pertinent de faire confiance aux engagements de ce même Hezbollah.

Cette partie du texte, déjà signée à contrecœur par les partisans des islamistes fera partie des promesses électorales non tenues. Et la FINUL, chargée de veiller au désarmement des milices, pourra passer un été tranquille, à l’abri dans les tentes et les véhicules de la force Onusienne.

Et la Syrie ?

Les contacts avec le Hamas étant bien avancés, la diplomatie française avoue également avoir rencontré à plusieurs reprises la Syrie. La seule ressemblance entre ces deux entités réside dans le fait que jamais, au grand jamais, il ne fallait les rencontrer avant que certaines conditions ne soient remplies.

Les conditions ne le sont pas et on les rencontre quand même. Rien que de très normal ! Un diplomate avoue tout de même : "Avec les Syriens on a un vrai désaccord. On leur parle sans illusion, avec la distance nécessaire, avec une longue cuillère". Allusion à un certain dîner avec le Diable. Ce diplomate impertinent a bien fait de rester anonyme.

Puisque Israël avoue également avoir des contacts au plus haut niveau avec la dictature des El Assad par l’intermédiaire de la Turquie, pourquoi la France devrait-elle attendre ?

D’autant que tout va vite. La surenchère est de mise. Le Ministre des affaires Etrangères syrien, Walid Mouallem, vient de déclarer ce matin : « Israël s'est engagé à un retrait total du Golan ». C’est du moins ce qu’annoncent certains journaux libanais dont l’Orient-Le Jour.

Cette déclaration, si elle peut paraître légèrement précipitée, est davantage destinée à fragiliser un peu plus le gouvernement d’Ehoud Olmert en proie à une droite de plus en plus menaçante. Et un Israël fragilisé, pensent les Syriens, ne courra pas le risque d’être trop exigeant vis-à-vis des voisins.

C’est évidemment mal connaître Israël. Mais si les diplomates étaient tous compétents, tous sans exception, cela se saurait.

Relevons néanmoins que la Syrie parle de paix avec Israël. Paix avec la restitution du Golan, cela va sans dire, et, de facto, la possibilité de bombarder la Galilée sans bouger les oreilles.

Le Liban est toujours en guerre avec Israël. Cela est même inscrit dans sa « constitution » et le nouvel homme fort du pays du Cèdre, militaire blanchi sous le harnais, est un vif partisan de cet état de guerre.

Sans méconnaître la volonté de paix qui doit forcément exister au sein des peuples libanais et syriens, le pessimisme reste de rigueur.

60 ans d’éducation à la haine ne s’évacuent pas aussi rapidement.

Primo

Auteur : Pierre Lefebvre