Pour André Dufour, l’islam, en sortant de son temple pour descendre dans l’arène, n’est qu’une idéologie totalitaire qui ne peut refuser d’être soumise à la critique.
«Je touche en ce livre à des choses grandes et délicates, aux choses religieuses.
J’ai refait le rêve des âges de foi ; je me suis donné l’illusion de vives croyances.
C’eut été trop manquer de sens de l’harmonie que de traiter sans piété ce qui est pieux.
Je porte aux choses saintes un respect sincère.
Je sais qu’il n’est pas de certitude hors de la science.
Mais je sais aussi que les vérités scientifiques ne valent que par les méthodes qui y conduisent et que ces méthodes sont inaccessibles au commun des hommes.
C’est une pensée peu scientifique que de croire que la science puisse un jour remplacer la religion.
Tant que l’homme sucera le lait de la femme, il sera consacré dans le temple et initié à quelque divin mystère.
Il rêvera. Et qu’importe que le rêve mente, s’il est beau ?
N’est-ce pas le destin des hommes d’être plongés dans une illusion perpétuelle ? Et cette illusion n’est-elle pas la condition même de la vie ?».
Parmi ceux qui connaissent son œuvre et sa part active dans le combat en faveur de la séparation entre l’Eglise et l’Etat concrétisée par la loi de 1905, nul ne peut taxer de cléricalisme l’auteur de cet exergue dont l’ensemble des œuvres fut condamné et mis à l’index par décret papal «opera omnia» du 31 mai 1922. Pour ceux qui l’ignoreraient, il s’agit de la préface écrite par Anatole France pour son roman «Thaïs». Ce texte n’en prend que plus de relief et éclaire la réalité de la laïcité telle qu’elle fut comprise par ses promoteurs, mais que d’aucuns considèrent comme incompatible avec la foi spirituelle alors qu’elle en est au contraire la meilleure garante.
La foi, qu’elle soit spirituelle, philosophique ou religieuse relève de l’intimité inviolable de chaque individu, de son «rêve», qui fait de chaque être humain un temple respectable et sacré. Mais dès que les tenants ou les entristes d’une foi font intrusion dans le domaine public, avec pour objectif de propager leur foi, de l’imposer ou de forcer les autres à s’y conformer, adapter, elle sort de l’enceinte sacrée du Temple du «rêve» pour déboucher sur l’espace profane du Forum où elle se heurtera aux autres croyances, aux autres convictions. Elle devient objet de discussion, de critique, de contestation ou d’hostilité et le fait que ses promoteurs s’en plaignent, protestent ou recourent aux tribunaux, relève alors de la plus parfaite «mauvaise foi». De privée, intime et sacrée, la foi devient publique, qualificatif qui la désacralise. Elle devient même objet d’hostilité, de rejet et d’irrespect lorsqu’elle entend imposer son suprématisme qui la placerait au-dessus des lois de la Cité et au-dessus des autres croyances. Elle devient une idéologie politique souvent armée et violente, sachant qu’en matière de religion ou d’idéologie, l’Arène n’est jamais loin du Forum déserté.
À moins de se soumettre sans résistance aux plus intolérants, il ne saurait donc être question de dérogation en faveur de telle ou telle prétendue foi qui n’est que le paravent d’une idéologie d’essence totalitaire. Toute concession, tout «aménagement», toute «discrimination positive» en faveur de l’intolérance équivaudrait à retourner notre meilleure arme, la laïcité en l’occurrence, contre nous-mêmes. Hors du Temple tout est politique, ce qui a pour corollaire qu’à l’intérieur du Temple, tout ce qui, faute d’y être proscrit, touche à la politique par le prêche, discours, détournement du rituel rend ce lieu profane.
A prétendre par son suprématisme dominer le pouvoir temporel, voire économique durant plus de quinze siècles, en interdisant le Forum où, à armes égales et à droits égaux, elle se serait trouvée confrontée à des croyances ayant d’autres vérités ou qui vont à la recherche de la Vérité, l’Eglise qui s’en prétendait la seule détentrice s’était désacralisée. Elle était devenue un pouvoir politique coercitif, idéologique, voire économique et, à éviter le Forum, elle s’était retrouvée dans l’Arène en compétition avec d’autres pouvoirs politiques, idéologiques et économiques. Ce fut finalement la Loi de la Séparation de 1905 qui, chez nous, l’aura ramenée à sa vocation première : la Foi.
On mesure le chemin parcouru depuis cette Séparation en lisant dernièrement l’interview d’un prélat accompagnant le Pape aux Etats-Unis et appelant toutes les religions à se mettre ensemble à la recherche de la Vérité, admettant implicitement un certain relativisme par rapport à la vérité. Combien aura-t-on excommunié ou fait condamner au bûcher par le bras séculier avant d’en arriver là ?
Il est vrai que par delà les critiques, l’Eglise pouvait et peut évoluer sans renier sa foi, puisque ses dérives, ses exactions et ses crimes, commis ou prêtés, ne sont pas dictés par les évangiles mais au contraire, les trahissent. D’où d’incessantes contestations au sein même du christianisme qui ont abouti à la Réforme, avec son appel au «libre examen» qui a ouvert la voie aux Lumières et à la séparation définitive, déjà amorcée par les souverains européens, entre le spirituel représenté par les diverses croyances, mais aussi par l’incroyance religieuse, et le temporel représenté par l’Etat et la Société. Loin d’être une rupture, cette séparation est au contraire un retour aux sources, puisqu’elle est déjà inscrite dans le discours prêté à Jésus : «Mon royaume n’est pas de ce monde» ou le fameux «Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu».
Ce n’est pas trahir la laïcité que de rappeler en toute objectivité le rôle de l’Eglise durant le premier millénaire, à travers ses divers Ordres religieux, dans la restauration et la sauvegarde de la civilisation gréco romaine disloquée par les invasions barbares, dans la «modernisation» de l’agriculture, dans le développement des réseaux scolaires, des hôpitaux, de sorte qu’on ne peut imaginer la civilisation occidentale sans l’apport, certes non exclusif, du christianisme.
Cette évolution de l’Eglise, plus particulièrement durant la seconde moitié du siècle écoulé, annoncerait des jours meilleurs pour l’esprit de tolérance et de respect mutuel si une autre religion, frustrée par plus de cinq siècles de domination occidentale dans les domaines scientifique, intellectuel, artistique, social et politique sur le monde, ne croyait son heure venue pour prendre sa revanche en n’utilisant ses mosquées que «comme rampe de lancement» et ses «minarets comme des baïonnettes pointées contre l’Europe», selon les termes du premier ministre de la république «laïque» turque si pressée de rejoindre l’U.E, sans oublier Boumédienne selon qui les les ventres féconds des femmes musulmanes rendront superflu l’usage de la force pour submerger l’Europe. Alors que le monde occidental a définitivement abandonné l’idée de conquête et stigmatise tout ce qui rappelle le nationalisme, à commencer par l’identité nationale, l’islam combine jusque sur notre propre sol les nationalismes arabe, turc et autres, avec une religion liberticide dont l’émigration favorise l’expansionnisme et les moyens de pression. Certes, tous les musulmans installés en Europe ne partagent pas forcément, loin s’en faut, ces objectifs totalitaires. Ceux qui se contentent de pratiquer paisiblement leur religion dans leurs foyer et dans les mosquées sont probablement majoritaires. Nous pouvons «porter aux choses saintes (aux yeux des croyants sincères) un respect sincère», sans être tenus pour autant de les ressentir comme saintes, mais ce sont toujours les minorités qui mènent le monde avec l’art de prendre les «masses» en otage.
En s’imposant comme détentrice exclusive de LA Vérité, en prétendant interdire toute critique, toute contestation touchant à ses dogmes, à ses mœurs, à ses méthodes, en recourant aux pressions, au chantage, à l’intimidation, voire à la terreur, l’Islam sorti de son Temple, n’est plus qu’une idéologie totalitaire au milieu de l’Arène que nous sommes en droit de brocarder ou contraints de combattre sous peine de disparaître. N’en déplaise au grand patronat vénal et à nos politiciens carriéristes à courte vue qui déroulent le tapis rouge* sous les pieds de ceux qui veulent nous dominer, c’est en toute légitimité qu’il convient de «traiter sans piété» ce qui n’a plus rien à voir avec la piété ni avec les «choses saintes».
© André Dufour pour LibertyVox
Note :
* : La frénétique agitation présidentielle en faveur d’une aberrante «Union pour la Méditerranée» n’est qu’un avatar de ce «tapis rouge».