Le sous préfet et la soupe rallongée
Le sous préfet limogé « n’a pas respecté son devoir de réserve ». La notion de devoir de réserve impose aux agents de l’Etat d’exprimer leurs opinions avec discrétion. Ce que certains internautes des sites comprennent par : « s’il avait critiqué la Serbie, il serait préfet », par « on n’a pas le droit de critiquer Israël » ou encore « il y a un nom de peuple ou d'Etat que l'on ne doit surtout pas prononcer sauf pour en dire du bien ou compatir à ses malheurs » . Pour ses partisans, le sous-préfet est un héros, un martyr, une victime de plus du « lobby ». Son limogeage prouve qu’il avait raison.
En effet le communiqué officiel ne dit pas si Bruno Guigue disait ou non la vérité sur Israël.
C’est pourtant essentiel. Car si Israël était vraiment « le seul Etat au monde dont les snipers abattent des fillettes à la sortie des écoles », si les Israéliens s’extasiaient vraiment « sur les prouesses d'une armée capable de tuer aussi aisément des enfants avec des missiles », si «la ressemblance entre le Reich qui s’assied sur la SDN en 1933 et l’Etat hébreu qui bafoue le droit international depuis 1967 » était vraiment « frappante », si les attentats du 11 septembre 2001 avaient vraiment « fait dix fois moins de victimes que le siège de Beyrouth par Tsahal en 1982 », si tout cela était prouvé par les faits, je serais le premier à féliciter Bruno Guigue de l’avoir dénoncés.
Mais rien de tout cela ne n'est produit.
L’argumentaire mensonger de B. Guigue est tiré de la propagande arabe et de citations extraites de leur contexte ou provenant de personnalités désavouées en Israël même. L’accusation de meurtre d’enfants sort de la propagande anti-juive classique : elle a permis à de nombreux pédophiles de mettre leur propre crime sur le dos de Juifs.
Qu’un énarque comme B. Guigue puisse rassembler sous sa plume ces poncifs montre qu’il y a urgence à réformer l’enseignement de l’Ecole Nationale de l’Administration en introduisant les faits historiques dans les leçons de dialectique et à donner la parole à ceux qui considèrent Israël pour ce qu’il fait et non pour ce qu’on espère lui voir faire afin de l’en blâmer.
Mais au moment où j’écris, un militant algérien m’envoie ses propres commentaires sur l’affaire du sous-préfet. Au départ, Guigue s’en prenait à des intellectuels qui avaient dénoncé dans une tribune dans le Monde (27 février) les positions de la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU vis-à-vis d’Israël.
Ce militant algérien (antisioniste par ailleurs) rappelle que « la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU a pris des décisions effectivement attentatoires aux droits de l'Homme et institué le délit de blasphème en faveur de l'extrême droite et des fascistes musulmans et dont le peuple algérien a payé le prix cher. Elle a toujours soutenu le terrorisme islamiste en Algérie et a été dénoncée, encore il y a un mois, par l'avocat algérien Farouk Ksentini, président de la Commission consultative des droits de l'homme, qui dépend directement de la présidence algérienne de Bouteflika. »
Concernant notre sous-préfet, le bilan est affligeant. Il méconnaît Israël, l’Algérie, les droits de l’homme… Alors qu’est-ce qui le pousse à écrire, à se présenter comme un défenseur des droits humains ? D’où tient-il ses sources d’information ? Serait-il guidé par des amitiés douteuses, comme oumma.com ? N’aurait-on pu attendre d’un énarque qu’il ait une capacité d’analyse large ?
Ce que nous a servi M. Guigue, c’est une mauvaise soupe. Il nous a refait un mauvais rata des années 30, où flottent des graillons d’anti-sémitisme. Qu’il ait agi par amitié pour des islamistes, par ignorance, par passion ou par racisme, peu importe : il l’a faite.
Le grand mensonge
La réalité d’Israël est l’inverse de cette « image effroyable », de ce « grand mensonge » répandus par Bruno Guigue l’ignorant. Les vérités factuelles sur Israël ne sont pas dites en France. La presse préfère « l’image effroyable », qui fait mieux vendre.
Sous la pression de pays arabes, l’information est filtrée, rendue partielle et partiale. Les rectificatifs rédigés avec force détails par les défenseurs d’Israël atterrissent dans les corbeilles des journaux. Les séquelles d’une oppression multiséculaire amènent des Juifs à cautionner l’image effroyable. Les associations anti-racistes ne savent pas démêler analyse politique, propagande et antisionisme.
Les jeunes qui veulent s’engager contre le racisme gobent la propagande raciste antisioniste. Les quelques voix courageuses qui s’élèvent pour rétablir les faits sont dénoncées par des monsieur Guigue et des CAPJPO.
L’affaire du sous-préfet relance le besoin d’expression des amis de la vérité, en l'occurence d’Israël.
De nombreux Français savent qu’Israël n’est pas ce pays effroyable. Ils savent qu’il y a « un grand mensonge » sans en connaître les tenants et les aboutissants, puisque les faits ne paraissent pas dans le débat public.
Comme Madame Alliot-Marie savait qu’il y a un « grand mensonge ». Il est vrai qu’il est plus simple de dénoncer le non respect du devoir de réserve que le grand mensonge.
A quand des grandes soirées d’artistes et d’intellectuels s’engageant pour dénoncer le mensonge permanent au sujet d’Israël ? Cela nous changera des autodafés de livres israéliens sous flonflons de boycott!
Alexandre Feigenbaum © Primo,