par Claire Dana Picard
AROUTS SHEVA
L'Italie a pris la semaine dernière une décision historique en faveur de la Libye. Lors de sa visite à Benghazi, le samedi 30 août, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a en effet déclaré que son pays "présentait ses excuses à la Libye et s'engageait à lui verser cinq milliards de dollars de dédommagements pour la période coloniale".
Lors de l'accord signé un peu plus tard avec le colonel Mouammar Kadhafi, Berlusconi a notamment déclaré : "Il est de mon devoir, en tant que chef du gouvernement, de vous exprimer au nom du peuple italien notre regret et nos excuses pour les blessures profondes que nous vous avons causées".
Réagissant à cette information, le président de l'Organisation mondiale des Juifs originaires de Libye, Meir Kahlon, a adressé cette semaine une lettre au chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi par l'intermédiaire de l'ambassadeur d'Italie en Israël. Dans la missive, Kahlon lui demande d'œuvrer pour que les Juifs libyens touchent également des indemnités pour les souffrances endurées lors de l'occupation italo-germanique de la Libye. Il a rappelé qu'ils avaient alors été victimes de persécutions, de violences et de spoliations effectuées par les autorités locales.
Kahlon, précisant qu'il intervenait au nom de son organisation, active en Israël, et en tant que membre du conseil d'administration des organisations des rescapés de la Shoah, a souligné que les Juifs de Libye avaient vécu pendant plus de 2000 ans dans ce pays et avaient toujours participé activement à la vie sociale sur place.
Et d'ajouter : "Nous avons appris par les médias que le gouvernement italien reconnaissait, 65 ans après son occupation, les dommages causés à la Libye par le régime colonialiste et acceptait de verser des dédommagements pour une somme de 5 milliards de dollars". Il a encore précisé : "Nous saluons l'attitude de l'Italie qui a su reconnaître ses erreurs historiques et a accepté de réparer les dégâts".
Kahlon a ensuite affirmé : "Nous pensons que l'Italie doit verser aux Juifs libyens des dédommagements pour les souffrances qu'ils ont endurées et dont ils sont marqués jusqu'à aujourd'hui". Il a rappelé que les Juifs de Libye avaient dû subir les lois raciales du régime fasciste et avaient perdu leur travail et leurs biens, ainsi que leur liberté de mouvement. Il a précisé qu'ils avaient perdu tout aspect humain lorsqu'ils avaient été transférés dans des camps de concentration au cours de la Seconde Guerre mondiale où plus de 700 d'entre eux avaient trouvé la mort.
La direction de l'organisation mondiale des Juifs de Libye a donc demandé au gouvernement italien d'entamer des pourparlers directs avec elle afin que les victimes juives ou leurs descendants puissent enfin obtenir ce qui leur est dû.
Avant de conclure, Meir Kahlon a abordé des questions plus actuelles en demandant au Premier ministre italien "d'œuvrer pour la paix au Proche-Orient". En précisant : "Nous sommes heureux de constater que, pour répondre au geste de l'Italie, la Libye a accepté pour la première fois d'envisager de lutter contre le terrorisme et de le condamner".
Une copie de la lettre de Kahlon a été envoyée au président libyen Mouammar Kadhafi. Il y souligne encore : "Nous voulons œuvrer pour la normalisation et la paix entre nous et la Libye. Nous avons laissé là-bas des maisons, des souvenirs, des cimetières où sont enterrés nos proches ainsi que des rouleaux de la Tora et des synagogues. Nous souhaitons à présent pouvoir retourner dans ce pays pour y visiter les lieux où un grand nombre d'entre nous sont nés".