19.12.08

LA MENACE VENUE D’AFGHANISTAN EST SERIEUSE



La « fausse alerte » des grands magasins « Printemps » à Paris ne doit pas se transformer en arbre qui cache la forêt. L’enquête dira – sans doute assez rapidement – si le dépôt de cinq bâtons de dynamite sans détonateur ni système de mise à feu est dû à un « isolé » plus ou moins perturbé ou à un de ces groupuscules violents qui s’agitent à l’ultra-gauche, mais le consensus est absolu tant au sein des services de sécurité que chez les experts indépendants : cette menace d’attentat n’a rien à voir avec une quelconque « filière djihadiste ». Dans l’heure qui suivait la découverte de ces explosifs, nous avions déjà, à l’ESISC, démontré l’absurdité de cette « piste islamiste ».

Mais cela ne signifie pas qu’il n’existe aucun danger, aujourd’hui, en France. Tout d’abord, bien entendu, si l’on s’en tient aux faits eux-mêmes, la manipulation d’explosifs – surtout une dynamite que les enquêteurs décrivent comme « ancienne » et donc peut-être déjà relativement instable – est non seulement illégale mais dangereuse. De plus, bien entendu, quiconque « s’amuse » avec des bombes et s’en sert pour menacer peut être, un jour ou l’autre, tenté par le passage à l’acte.

Mais plus fondamentalement, les menaces émanant de la sphère islamiste et liées à l’Afghanistan sont très réelles. Le 20 janvier, Barack Obama deviendra président des Etats-Unis. Il a fait de l’Afghanistan sa priorité dans la lutte anti-terroriste et compte y faire porter un effort particulier. Certains pays européens, dont la France, approuvent ce choix et participeront à ce renforcement, entre autres en déployant des troupes supplémentaires.

Pour les islamistes s’est donc ouverte une « fenêtre d’opportunité » qui durera bien après le 20 janvier. S’ils veulent décourager l’Europe, l’amener à se retirer du terrain afghan, c’est maintenant ou dans les mois à venir qu’ils doivent frapper, pas quand ce renforcement et la nouvelle politique qui l’accompagnera auront porté leurs premiers fruits, comme le « surge » l’a fait en Irak. Dans les semaines et mois à venir, donc, les intérêts européens seront particulièrement menacés.

Et ceux de la France le seront encore plus : l’armée française, en effet – qui, avec l’armée britannique, est l’une de celles qui domine le mieux les mécanismes de la contre insurrection – fait du bon travail en Afghanistan. La conjonction d’actions militaires et civiles commence à porter ses fruits dans les provinces où ces troupes sont déployées. Une raison de plus pour frapper la France. Sur le terrain, les soldats français mais aussi les coopérants et les personnels des ONG sont en première ligne. Mais les néo talibans comprennent aussi l’impact immense que pourrait avoir un attentat dans l’hexagone et ils feront tout pour frapper sur le sol français et surtout Paris.

Ils peuvent compter, pour les y aider, sur la mouvance islamiste venue d’Europe. Il est significatif de constater que les filières d’acheminement de Moudjahidin qui se focalisaient, ces dernières années, sur l’Irak ont, depuis quelques mois, recentré leurs efforts sur l’Afghanistan. De récentes arrestations, en Belgique et en France, en témoignent.

Comme Barack Obama, comme les dirigeants européens, les djihadistes ont parfaitement compris que c’est là que se livrera la prochaine bataille de dimension stratégique entre le salafisme, ce « fascisme vert » et la communauté internationale.

Claude Moniquet
pour l'ESISC