Iran : La grosse colère de Moscou
Téhéran cherche à renouer le dialogue avec Washington et cela déplaît très fortement à Moscou. Tout a basculé le 23 juillet après un discours d’Ahmadinejad invitant Washington à se montrer plus souple avec l’Iran. Moscou a alors bloqué les travaux d’achèvement de Bouchehr. Il vient d’imposer deux autres punitions aux mollahs suite aux propos d’Aghazadeh, un autre représentant du régime des mollahs.
De passage à Vienne, le 24 juillet, Aghazadeh, le responsable du programme nucléaire iranien, a clairement déclaré que Téhéran pouvait contribuer à améliorer la situation en Irak, si « on » (c’est-à-dire Washington) acceptait de dialoguer avec la république islamique d’Iran.
Cette fois Moscou a décidé de taper très fort en arrêtant sa coopération avec Téhéran dans deux très importants projets en cours : la livraison des missiles russes S-300 annoncée avant le 23 juillet, et une adhésion de l’Iran à l’Organisation de Coopération de Shanghaï qui avait également été annoncée le 18 juillet par Moscou, à la veille de la rencontre de Genève.
L’adhésion ratée| L’OCS englobe un espace de commerce, mais surtout un pacte militaire qui accorde à ses adhérents la protection conjointe des armées russe et chinoise. En cas d’agression par un autre Etat tiers, la Chine et la Russie sont tenues d’intervenir aux côtés de leurs alliés. On devine l’intérêt une telle adhésion pour Téhéran. Cependant, Moscou ou Pékin se sont toujours méfiés des mollahs qu’ils soupçonnaient de chercher à profiter de cette protection pour avoir les mains libres dans son bras de fer avec Washington. Les deux plus puissants adversaires de Washington ont donc refusé toutes les requêtes d’adhésion de Téhéran. Cependant, à la veille de la rencontre de Genève, le ministère russe des Affaires étrangères (MID) a annoncé sa décision de mettre fin au « moratoire (sur l’élargissement) en vigueur depuis deux ans » pour étudier la demande de l’Iran et du Pakistan.
Après les invitations répétitives lancées par Téhéran à l’administration Bush, Moscou a décidé de mettre fin à cette initiative de la manière la plus sèche. Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères a simplement annoncé que la question de l’élargissement de l’Organisation de coopération de Shanghai, notamment à l’Iran, n’avait pas été évoquée lors du sommet des chefs de la diplomatie des pays de l’OCS à côté de Douchanbé au Tadjikistan.
L’affaire des S300| En septembre 2007, l’agence Reuters avait affirmé que Moscou avait commencé la livraison des premières batteries de missiles S300 à l’Iran. L’information s’est avérée non fondée. Puis en décembre 2007, le ministre iranien de la défense a annoncé la livraison à l’Iran de 5 batteries de missiles S300, mais Moscou a démenti suite à des révélations iraniennes sur l’exigence des russes de déployer les missiles en Iran comme une réplique au système anti-missile ABM que les américains souhaitent déployer en Pologne et en Tchéquie. Il est certain qu’à cette époque les instructeurs russes avaient déjà formé les techniciens iraniens chargés de réceptionner et déployer ces missiles.
Plus récemment le 22 juillet, c’est-à-dire à la veille du discours d’Ahmadinejad, la presse israélienne a annoncé que cette livraison contrariée allait reprendre en septembre pour finir vers le début 2009. Moscou n’a pas démenti cette information. Mais, les deux discours pro-Washington de Téhéran ont modifié les plans de livraison de Moscou.
Ce 25 juillet, Rosoboronexport, l’organisme de production et d’exportation d’armes russes, a annoncé que selon les conventions internationales, l’Iran avait bel et bien droit à ce genre de missiles et Moscou le droit de les lui livrer, mais que néanmoins, cet organisme avait décidé de ne pas le faire. Rosoboronexport n’a pas jugé nécessaire de fournir un motif à ce refus. Il a également précisé qu’il ne pouvait fournir aucun calendrier pour une future livraison, ajoutant que « cela dépendrait de ce qui adviendrait prochainement ».
Pour frustrer encore plus les mollahs, Moscou a ostentatoirement fait savoir sa décision de livrer le même jour plusieurs batteries de missiles S-300 à Hugo Chavez en visite en Russie. Le ministère russe de la défense chargé de conclure la vente a précisé qu’une fois les S-300 livrés au Venezuela, « les éventuels ennemis de ce pays auront du mal à le punir par des frappes contre ses installations pétrolières ». Il n’y a pas que Téhéran qui soit maître dans l’art des messages indirects.
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